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X. Ab origine fidelis

X. Ab origine fidelis
Farrarius Faber
« J’aime mieux forger mon âme que la meubler. »
Montaigne
Il n'y avait de mot pour décrire la douleur que j'ai ressenti là bas..
Un homme chauve et une femme vêtue de rouge discute devant les résultats radiologiques d'un homme.
L'homme entama :
« Il s'est réveillé pendant l'opération. »
« L'anesthésie n'a pas marché ? Des doses inadéquates ? »
« Si.. mais le seuil de douleur critique l'en a fait s’émanciper. »
***
Dans la salle vierge régnait un silence monastique, ou presque. Seul raisonnait dans la pièce le "bip" ulcérant et monotone de l'electro-cardiogramme qui affichait ses constantes vitales. Sur la table d'opération, l'homme mât était inconscient : Il avait été soigneusement lavé et préparé. Plusieurs fils d'épaisseurs différentes reliaient les parties de son corps à de multiples appareils sophistiqués. Certains câbles, ceux des jambes notamment, étaient alors plantés à même la peau, s'enfonçant profondément dans la chair de l'endormis. Pieds et mains étaient solidement attachés autant pour la sécurité du personnelle que pour la sienne.
De l'autre coté de la pièce, derrière la baie vitrée, un homme blanc en blouse de même couleur, le regard placide et le crane rasé observait les ébats. Devant lui, des écrans de surveillance et de contrôles, et plusieurs interrupteurs. Avec plein d'assurance, il activa l'un d'entre eux, et commença à parler au micro.
« Procédure de métallisation, phase 1. »
Un bruit de moteur envahit la pièce, émanant de l'appareil branché aux jambes de Pied Noir. Il semblait pomper un liquide argenté, qu'il pulsait dans les jambes de l'homme via les câbles. Le chauve fit un sourire discret, poursuivant la manipulation de son poste de contrôle.
***
« Que s'est-il passé alors ? »
Le chauve se massa la tempe et répondit :
« Il hurla comme un écureuil qu'on égorgeait. »
« Vous avez continué l'opération ? »
« Oui, Il m'a fait promettre de ne jamais interrompre cela. »
La jeune femme plissa les yeux.
« Il ? »
***
Je vois.. la lumière, puis ensuite, la pénombre.
Et puis, je voulais mourir, à nouveau.
La cuve s'ouvrit, et l'Humain tomba dans un fracas sourd. Il hurlait sa peine et sa rage, se tenant les deux jambes, incapable de se relever, impuissant. Son souffle était court, il ne voyait à peine que ses mains qui accrochait le sol, à la recherche de quelques précieux centimètres. Chaque geste, chaque mouvement était un supplice de plus. Pied noir appelait à l'aide, mais personne ne vint. Il n'y avait que lui, et lui seul.
L'homme semblait sonné, mais poursuivait à périple à la recherche de ses effets personnels. Il étira son bras, se feignant enfin d'un sourire victorieux quand il attrapa enfin son communicateur pour contacter de l'aide.
Elle, lui.. non, pas lui, il ne viendra pas.. peut être lui ou elle, ou eux..
« Je ne peux pas m'occuper de vous maintenant Citoyen.
Appelez quelqu'un d'autre.
»
« Opération militaire. »
« Je suis occupée désolée. »
« Suis en SR. »
« Votre correspondant est injoignable. »
Il avait en une fraction de seconde perdu son fin sourire, laissant place à une profonde déception.
« On trouve toujours du temps pour certains, mais jamais pour les autres. »
***
« Journal, parfois j'aimerais être un antique livre dont on s'occupe et qui deverse son savoir sans jamais se taire, puisqu'il ne peut qu'être lu. J'ai l'impression que l'immortalité nous a fait perdre l'entraide entre Hommes. »
« N'attendez plus qu'on vous forge votre âme ou votre arme, forgez là vous même. »
L'humain concluait son texte, et alors qu'il s'élevait de sa chaise sans mal pour la première fois depuis son décès, il lança sa quatrième jambe dont il n'avait plus usage.

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