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H.T. Morduch était plus que désappointé. Plusieurs heptades de recherches s'étaient avérées totalement vaines : K.Mosavi, quelle que soit son identité réelle, ne semblait jamais avoir existé pour l'Imperium.

Un fantôme.

Mais un fantôme qui laissait pourtant nombre de traces, et dont les chroniques holographiques hantaient de plus en plus Morduch. Le journaliste en était venu à se demander si K.Mosavi n'était pas l'un de ces "premiers nés", ces hommes qui avaient cotoyé les frères Enclism au temps de l'édification de l'Imperium.
Cette hypothèse expliquerait le fait que, malgré toutes ses tentatives, Morduch ne soit parvenu à recouper les informations sur Mosavi, car il n'y a de secrets plus enfouis que les fondations de l'Imperium.

Homan laissa son regard errer dans les espaces vides du DCN, glissant à nouveau, comme aimanté, vers sa console de visionnage. La dernière chronique de Mosavi qu'il était parvenu à extraire l'avait mis profondément mal à l'aise. Il y a avait dedans un écho qui le glaçait jusqu'au plus profond de sa chair. Mais l'homme d'outre-tombe y évoquait aussi les frères Encllsm, ce qui semblait accréditer l'hypothèse qu'il ait en fait vécu du temps d'Imperator.

Homan Théophraste Morduch se vida un autre verre de skiwi pour se donner du courage, puis entama un nouveau visionnage de l'archive maudite, en quête d'indices qui lui auraient échappé.


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3/237.4 Hôpital Impérial - Haute Cité


Trois côtes brisées, une mâchoire en mauvais état et quelques points de sutures... qui disparaitront avec le prochain clone.

A tout prendre, il ne s'en était pas si mal sorti. H.T Morduch sourit légèrement tandis que la jolie elfe en blouse blanche lui administre sur le torse une paumade de régénération cellulaire.

Non, décidément, il ne s'en était pas si mal sorti.

Son jugement eut été tout autre, il y a de cela quelques heures seulement, lorsque, au fond de cette ruelle humide, cet attardé d'orc s'acharnait sur son corps meurtri.

ILS lui étaient tombé dessus alors même qu'il sortait de l'ambassade impériale. Le cabinet de l'ambassadrice Elea avait accepté de le recevoir au sujet de sa demande d'information concernant le dénommé Mosavi, l'homme mystérieux dont il avait retrouvé la trace dans les archives du DCN. Après avoir passé les différents barrages et filtres de la sécurité, patienté deux bonnes heures dans un hall vide, un jeune conseiller kobold l'avait finalement reçu dans un bureau à la décoration réussissant la gageure d'être à la fois pompeuse et glaciale. Le plus pur style Imperium en somme, songea Morduch, en s'installant dans le siège que lui tendait le jeune Kobold.

H.T Morduch n'aimait pas les Kobolds. Il décida instantanément qu'il aimait encore moins le spécimen qui se trouvait devant lui, tout sourire, assis derrière son bureau comme un prédateur lové dans son terrier.

« - Nous avons bien recu votre requête, monsieur Morduch … »

H.T Morduch ne pouvait détacher son regard de cette langue féline qui semblait danser la sérénade dans cette gueule garnies de petites dents blanches et pointues. Il se demanda un instant si le conseiller les avait fait faire blanchir un peu plus qu'au naturel, par coquetterie. Les Kobolds, malgré un physique des plus repoussants selon les standards de Morduch, étaient des créatures connues pour attacher une grande importance à leur apparence. Un haut fonctionnaire de l'Imperium ne devait pas déroger à la règle.

« …. c'est donc avec regret, suite à ces nombreuses vérifications, que je me dois de vous annoncer que le nom que vous nous avez transmis ne correspond à aucune entrée dans nos bases de données. Ce qui veut dire que cet homme n'a jamais existé, car nos banques de donnes en aurait gardé traces sinon. »

Le conseiller se leva, tout sourire. Morduch se leva à son tour en lui rendant son sourire, tout en se demandant intérieurement quel était l'abruti qui avait présidé à la création de cette race perverse.

« Navré, Monsieur Morduch... »

Le présentateur de DCN ne prononça pas un mot jusqu'à ce qu'il soit ramené jusqu'aux grilles de l'ambassade par deux gardes en uniformes. Dehors, une pluie fine d'acide battait le permabéton de l'avenue. Homan Morduch se dit qu'une petite marche lui permettrait de réfléchir à ce dernier échange.

Mal lui en prit.


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Ils étaient trois.

Il ne se rendit compte de la présence du premier qu'au dernier moment, lorsque celui-ci arriva par derrière et le bouscula violemment, l'entrainant avec lui sous les porches d'une ruelle limitrophe, à l'abri des néons de la grande avenue.

La brute l'attendait derrière une pile de détritus. D'un coup sec dans le plexus, qui semblait n'être qu'une pitchenette pour cette masse de chair, il envoya Morduch au sol. La mâchoire de l'humain heurta violemment le sol. Un gout de sang dans la bouche, cherchant à reprendre son souffle, il leva les yeux vers ses deux agresseurs. Un nouveau coup dans les cotes, et il s'effondra cette fois de tout son long sur le revêtement humide de la ruelle.

Sa vision s'entacha d'halos lumineux jouant comme des feux follets sur les flaques qui jonchaient le sol; ses muscles se refusèrent à risquer une nouvelle tentative pour se redresser. A la limite de sa conscience, il entendait le ricanement de son premier tortionnaire, un bruit de crécelle rouillée. A ses cotés, son compère aspirait l'air bruyamment, par saccades enragées, comme un taureau attendant probablement que Morduch tente de se relever pour à nouveau charger. Un plaisir que Morduch n'était pas prêt à lui accorder.

– " Quel dommage, Monsieur Murdoch..."

La voix n'était pas celle de Crécelle, ni celle du taureau, qui devait être beaucoup plus rauque au vu de sa corpulence. Il y avait dans cette troisième voie des accents métalliques, mais également une pointe de flegmatisme, comme si la voix, quel que soit son diable de propriétaire, s'apprêtait à lui annoncer avec regret que son tailleur commandé la semaine dernière aurait encore quelques jours de retard avant d'être livré.

– "... Quel dommage que vous ne sachiez plus tenir votre place."

Morduch se risqua à lever un instant la tête pour jeter un rapide regard. Il vit une ombre, en retrait des deux sbires qui continuaient à l'observer. L'ombre fumait une cigarette, tout en tenant de l'autre main un parapluie, accessoire des plus saugrenue en cette occasion.

– " Vous êtes un citoyen prometteur, Monsieur Morduch. Vous avez des compétences, vous êtes intelligent visiblement, et l'Imperium a besoin d'hommes tels que vous... si seulement vous pouviez mettre de coté ces petites lubies."

– "Lubies ? "

Morduch s'était exprimé en crachant quelques gouttes de sang. Il sentait une douleur sourde dans sa poitrine. Malgré tout, il se redressa légèrement pour regarder l'ombre.

– " Votre curiosité, Monsieur Morduch. La curiosité est une qualité pour un journaliste, mais un bon journaliste doit aussi savoir la brider quand il le faut. Or vous, Monsieur Morduch, vous vous laissez aller à vos petites lubies."

Morduch grimaca, crachant un nouveau caillot de sang. Se redressant sur ses genoux, il regarda avec dédain ses agresseurs.

– "Je ne comprends rien de ce que vous me dites, Mary Poppins. Je ne suis pas homme à avoir des lubies."

L'ombre bougea avec une rapidité surnaturelle. Avant que Morduch ne puisse faire un geste, l'armature d'acier du parapluie s'écrasa cruellement entre ses omoplates, le propulsant à nouveau violemment à terre. Les halos lumineux se remirent de plus belle à danser leur sarabande.

– "Cessez vos recherches, Morduch". La voix s'était faite cassante, aussi glaciale que l'acier qui venait de le frapper." Pour votre propre bien. Mosavi n'existe pas, n'a jamais existé, et n'existera jamais. Et si vous persistez dans cette voie, cela pourrait bien être également le sort qui vous attend."

Face contre terre, Morduch entendait Crécelle et Taureau ricaner comme deux vautours autour de lui. Un dernier coup de pied dans les côtes lui arracha un hoquet de douleur. Sa conscience vacilla. Il crut encore entendre le claudiquement d'un parapluie sur le sol humide, le bruit résonnant de plus en plus faiblement sur les murs de la ruelle. Puis, subitement, il réalisa être seul à nouveau.

Une dizaine de minutes s'écoula avant que Morduch ne trouve la force de se redresser suffisamment pour s'asseoir sur un perron proche. Tout en continuant épisodiquement à cracher des caillots de sang, il se mit fébrilement à griffonner quelques notes sur le calepin qu'il portait toujours sur lui.


"Un changement de stratégie s'impose, songea-t-il. Vos amis sont des plus chaleureux, mon cher Mosavi. Mais cela ne suffira pas.


Vous ne m'échapperez pas."


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