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Forum Role Play » L'EMPIRE ET LES 9 SECTEURS, L’EMPIRE ET LE NEXUS

Acide Romance

Créé par Sears~1552 le 04 Avril 2010 à 19:23

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Sears~1552 Posté le 04 Avril 2010 à 19:23 #1
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Acide Romance


Il ne pleuvait pas ce soir. Pas un orage, pas une goutte ne venait interrompre le flux indiffèrent qui se mouvait inlassablement dans les abîmes d'une Dreadcast triste et fanée. Masses grondantes de chair et de mécanique, les êtres intelligents, du haut de leurs millénaires de conquête et de victoire sur le monde, marchaient sur les routes amblyopes, le regard froid et machinal, d'un pas pressé et automatisé, s'affairant sur un destin qu'ils ne maitrisaient plus, mais qu'ils semblaient pourtant empressés de rejoindre. Non, il ne pleuvait plus, car même l'atmosphère semblait avoir abandonnée a leur sinistre sort les mortels, a l'instar des Dieux continuellement imités par l'ouvrage. Seul le vent tiède et maussade semblait encore ressentir quelques pitiés pour le Sapiens, soufflant timidement entre les immeubles de Babel et rappelant aux rares hominidés encore conscient de cette petite attention a quel point la vie pouvait être agréable avec de petits riens. Dans ce grand jardin défraichi depuis longtemps, les métaphores prenaient place avec une joie presque palpable. Les tours de verre, hautes herbes calcinées par les canicules qu'avait engendré l'être humain irréfléchi, trônaient avec force au milieu de la jungle microbienne. Les passant, ces petites fourmis serviles et soumises, grouillaient avec hâte pour subvenir aux besoins de reines et de larves toujours plus gourmandes. Les véhicules entassés dans de méphistophéliques bouchon de circulation rappelaient ces grosses chenilles grasses et lourdes qui se suivaient avec une lenteur a faire pâlir l'un de ces hippies alcoolisé jusqu'aux genoux. Les vaisseaux de transports voguaient dans de réguliers mouvements de va-et-vient dans le ciel, comme d'insupportables mouches farfouillant un cadavre frais. Et dans cette féerie du micro-monde, il y avait Isiah "Sears" Lincoln. En tête a tête romantique avec une bouteille de Whisky, son regard parcourait l'horizon, tandis qu'il couvrait de doux baisers sa belle de verre.

Depuis plusieurs mois, Isiah s'était surpris a fréquenté ce genre de lieu ouvert, cherchant comme un dément les réponses existentielles que sans doute plusieurs milliers de philosophes n'avaient pu résoudre en plusieurs milliers d'années, sous plusieurs milliers de formes différentes. Il en était bien garant, certes, mais l'être humain moyen a souvent le sentiment d'être au delà des limites quand l'alcool glisse avec sensualité dans ses veines accueillantes. Et la réalité était bien là, quand il était question de flirte avec une jolie flasque en fin de soirée, Isiah pouvait prétendre sans mentir qu'il n'était guère si chaste. Comme un mythomane maladif, il osait encore se mentir a lui même, masquant dans ses propres pensées les réalités de ses soirées arrosait où il finissait bien souvent dans les bras d'une immigrée de l'ex-bloc soviétique, mise en bouteille a la méthode traditionnelle. Trouvait-il encore autant de plaisir a déshabiller une vodka comme autrefois ? Sentait-il encore son cœur battre a tout rompre au simple son d'une capsule qu'on jette promptement sur la première table venu ? Son regard pétillait-il toujours quand crépitaient les pas si innocentes bulles d'un excellent champagne ? Non, il avait perdu le gout de tout cela. Pourtant, a force de regarder au fond de son verre, il finissait par oublier ces petits détails, quelques fois s'endormant, épuisé, évinçant sans même s'en rendre compte une glaciale bouteille qui pleurera ses dernières larmes sur un sol poussiéreux.

Depuis bien longtemps, Sears avait troqué le contact humain contre la froideur d'un flacon. A quoi cela rimait ? Lui qui avait mené de tout son long une vie de débauche et de maladresse, lui qui avait trahit ses plus proches amis pour sauver sa vie, lui qui avait craché sur les mains qui s'étaient tendues vers lui. Dans les dernière pensées encore lucides qu'il avait, il comprenait que l'alcool n'était qu'un moyen de retarder l'inévitable. Il aurait du sauter depuis longtemps du haut de ce pont.

Comme une divine révélation, Isiah se leva. Ses pas lents et méthodiques semblaient ceux d'un infirme a qui la prière aurait rendu les jambes. Son regard hagard se perdait dans l'obscurité des nuits Dreacastiennes, et son esprit semblait suivre cette ligne de conduite, s'envolant au loin, anticipant les intentions de l'infortuné. Plus que trois pas. En dessous de lui, les véhicules avançaient avec peine sans se préoccuper de la marionnette qui cillait au dessus de leurs carrosseries. Deux pas. Des coups de klaxons semblaient rythmer l'avancée cadavérique de l'homme, frappant la nuit de leurs stridents sons. Un pas. Une mouette passa prêt d'Isiah, sans que celui-ci ne lui accorda la moindre attention, trop perdu dans ses pensées vagues. Il était arrivé au bord d'un vide pétrifiant, tombant sur une centaine de mètre avant de terminer son chemin sur ce qui semblait être une ruelle condamnée des bas-fonds. Alors Isiah ferma les yeux.

Et, plaçant ses bras en croix a la manière d'un Christ rédempteur, il se laissa basculer dans l'espace. Son corps lourd l'entraina comme un bloc mou vers le sol encore éloigné. L'air flagellait ses oreilles avec force, son visage était fouetté par la pression de sa chute. Et il tombait, toujours plus vite. Son corps dont il n'avait plus le contrôle prenait de la vitesse, et l'homme ressentait alors la peur. Il voulait que cela cesse. Sa chute continuait, elle criait, et il comprenait qu'il s'écraserait comme une loque sur Terre. Le vent lui faisait mal aux oreilles, et le sol se rapprochait. Il y était. Il pouvait le ressentir. Ses yeux était toujours fermés. Le sol de béton était là, a quelques secondes. Il y était. Alors y ouvrit les yeux, et regarda la fin de sa vie.

Le vide était toujours devant lui. Et devant ses pieds, affamé, le néant semblait l'appelait. Il était toujours là, a la limite de la vie et la mort, ses pieds chevauchant le bout de l'esplanade. Dans sa main, il y avait toujours cette bouteille de Whisky, qui ne demandait qu'a être sucée jusqu'à son fond. Alors Sears fut prit d'un fou rire. Un rire de fou, plutôt. Comme un furieux, il entama une dernière et profonde gorgée d'alcool, fit quelques pas de maladresse en arrière, et s'écroula, ivre mort, sur la passerelle grillagée de l'esplanade, comme pour sceller cette acide romance.