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EDC de 65442

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Panopticrade

Les gestes héroïques sont le récit de ceux qui font.
Les contes cyniques sont les écrits de celles qui se fondent.


Les proverbes pédants sont la grosse tête des elfettes.


Ce n'est pas facile de voir qu'on ne voit pas grand-chose, mais ça l'est davantage dans cette pièce sans trop de lumière, aux rares néons encrassés et à l'ameublement douteux. Il y a deux silhouettes, et elles sont peut-être féminines, peut-être pas, c'est difficile à savoir avec leurs tenues informes dont l'esthétique crasseuse ferait vomir tout styliste de la haute.


Panopticrade



Le styliste serait sans doute assez vite rejoint par tout gnoll qui entrerait, parce que le fumet des deux silhouette est fin, relevé comme un rat avarié, pourtant ça pourrait n'être pas si désagréable, cette odeur de tanière prolongée. Mais ni styliste ni gnoll n'entreront ici, car les petites salles sombres leurs rappellent trop la chambrette où leur tuteur de l'Hospitalium les enfermait de longues heures afin de leur apprendre la vie. Ils l'avaient bien cherché, selon lui.


Mais contrairement à nos non-invités et à leur tuteur, les deux silhouettes se tiennent à distance respectueuse, enfin, assez près pour entrevoir les traits l'une de l'autre en plissant les yeux, ou pour s'entendre sans avoir à élever la voix. Il y a pas mal de bouteilles vides qui jonchent le sol, mélange de sucre et d'alcool, et ma foi ça ne s'agite pas beaucoup. Quelques mots prononcés ici et là, éraillés ou guillerets.


...



Après, je sais ce que certains attendent, mmmh, je lis depuis assez longtemps pour ne pas être complètement dupe. C'est quand, les ''soudain'', les pew pew, le sexe et les drames ? Puis y'a les autres, ceux qui traînent dans les mirettes les écrits de l'elfette depuis une durée suffisante pour savoir qu'il ne va rien se passer, pas d'explosions de nitroglycérine ou de sentiments, coups d'épée et maux élégants, non, et ceux-là ne seront pas déçus. Quand on porte un masque pour les trop rares sorties, le vrai travail se fait dans les alcôves délaissées.


On pourrait penser que quelque chose est mort en elle, si on se fie à son haleine du moins, mais elle ne semble pas vraiment malheureuse pourtant. Et puis elle bouge peu, mais elle s'interroge beaucoup, sur des choses petites et grandes, enfin, petites, surtout, insignifiantes. ''Pourquoi dans la Ville des contes décatis, les gens pensent-ils tous pouvoir prétendre simultanément à des drames et une fin joyeuse ?'', ''que valent celles qui agissent sans celles qui leur donnent de la valeur en n'agissant pas ?'', et autres ''les absents des grands événements n'étaient-ils pas occupés à vivre plutôt qu'à suivre ?''.


Si on lui posait la question, à elle qui a vu deux personnes différentes en trois heptades, elle dirait que sa vie est remplie, très remplie, même, sans plus s'étaler. Mais c'est ça qui est chiant avec les mondes intérieurs et les coms interposés, avec les tissages et les arrières-pensées feutrées. Les développer au tout-venant est épuisant, et puis, un esprit en spirales, c'est comme une arme pré-apocalyptique : même en offrant une reproduction raisonnable, ça ne vaut pas l'original (syndrome du Cratère du SI). Puis de toute façon, c'était mieux avant, mais avant plus personne n'est d'accord sur ce que c'était.


...



Quand je serai une véritable ancienne,
je deviendrai historienne de l'insignifiance.
Les gens me consulteront parce que j'aurai énormément écrit,
et je leur apprendrai tout ce qui ne les intéresse pas,
et rien de ce qui les intéresse.
Je crois que je rejoindrai vite la liste des oublis.
Malgré les sourires, je ne sais pas combien auront compris.

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