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Un million de petites nanites, et moi, et moi, et moi (2)

[art=http://www.dreadcast.net/EDC/Silence/Article=6348]Injection[/art] +3,8 cycles
Silence avait attendu cette cigarette pendant des cycles. Assis sur le trottoir, indifférent aux regards désobligeants des passants, il la fumait d’une main tremblante. Il avait l’habitude des spasmes après les efforts physiques intenses. Mais normalement, seuls ses membres biologiques étaient affectés. Voir ses prothèses s’agiter, les sentir frémir, n’était définitivement pas normal. Derrière lui, massif, presque menaçant, s’élevait le Centre de Clonage dont on l’avait éjecté un peu trop brusquement à son goût quelques minutes auparavant.
- Appelez si vous constatez quelque chose, un changement. Et prenez quand même votre Uranium ! , avait lancé le techos avant de refermer la lourde porte de l’aile des laboratoires sur un sourire narquois, laissant Silence comme un con dans l’immense hall d’accueil.
Quatre cycles horaires après la procédure et sa première dose d’Ura, qui lui mettait déjà la tuyauterie en vrac, Silence était encore sous le choc. Il en avait concrètement plein le dos des “réveils” brutaux et douloureux et avait, pendant les convulsions provoquées par l’injection, vociféré d’une voix étrangement modulée quelque chose à propos “d’arracher les dents au prochain connard qui le toucherait”. Tout du moins, c’est ce qu’il avait voulu exprimer. Car il lui semblait bizarrement en avoir hurlé une partie en modulations binaires, alors qu’il n’était pas une foutue boîte de conserve. Mais le technicien en avait manifestement compris assez pour rapidement entraver son cobaye en attendant que la crise passe. Malgré la blancheur presque éblouissante de la salle, le Cyborg en avait vu de toutes les couleurs, ses yeux semblant d’un coup percevoir toutes les longueurs d’ondes du spectre magnétique. Bien qu’il y ait de fortes chances que ce n’eut été qu’une illusion, il était convaincu d’avoir vu du son, et d’avoir entendu les néons qui garnissait le plafond chanter des trucs elfiques. Il avait senti son corps fourmiller de milliers, de millions de micro-novas lui donnant la sensation d’exploser autant de fois, dématérialisant jusqu’à ses pensées, pulvérisant la moindre idée cohérente avant même sa formation. Dans ses mouvements erratiques, bien qu’entravés, il vit à travers lui-même par intermittence, comme si son corps devenait intangible plusieurs fois à chaque milliseconde. Puis, aussi vite qu’elle l’avait expulsé aux confins du cosmos, la réalité l’avait rappelé brutalement à elle, le laissant perplexe quant à celle de l’expérience. Le phénomène n’avait duré que quelques minutes, quand lui l’avait vécu des heures durant.
Hagard, prenant un bref moment pour se rappeler où il se trouvait, Silence s’était fait accompagner par le technicien dans une minuscule chambre, dont l’un des murs était couvert sur toute sa surface par un miroir. La pièce, du même blanc à rendre fou que la salle qu’il venait de quitter, ne comportait qu’un lit spartiate et une table de chevet, immaculés également. Le Cyborg ne sentait à ce moment là absolument rien s’opérer en lui, hormis son estomac se révolter immédiatement lorsqu’il vit le gobelet en plomb, dégageant de légères fumerolles vertes, qui trônait sur le petit meuble. Devant sa grimace, le technicien s’était senti obliger de préciser de sa voix nasillarde :
- Il faut le prendre tout de suite, pour déclencher le processus.
- Rrrm…
Silence avait avalé l’infâme liquide d’une seule traite avant de s’écrouler sur l’inconfortable matelas, avec l’espoir que les 4 prochains cycle horaires s’écouleraient rapidement. Il avait horreur d’être observé, épié, et il ne faisait aucun doute que le miroir, évidemment sans tain, devait abriter toute une brochette d’autres tuniques blanches à tête de fouine. Sans même songer à toute la batterie d’instruments divers de mesure et d’enregistrement dont devaient receler les parois de la pièce. Il s’était plongé dans un sommeil sans rêve avant même que le techos le laisse à son sort, et l’avait donc retrouvé un peu moins de 4 cycles plus tard, droit comme un piquet devant lui avec une expression qui en disait long sur sa déception.
- Aucun changement, lanca-t-il abruptement, presque sur un ton de reproche.
- S’per… T’as d’aut’ bonnes nouvelles ? , répliqua Silence en massant sa nuque douloureuse.
- Pour moi, oui. Vous pouvez partir. Le plus gros du processus aurait au moins dû se lancer, et il n’y a manifestement rien de notable. Donc…
L’homme lui avait ensuite jeté ses affaires, comme on jette une carcasse faisandée à un Gnoll en espérant ne pas y perdre un bras, avec un soupçon de mépris dans le regard. Silence avait atteint sa limite avec cet empaffé, aussi s’était-il vivement levé, son poing métallique déjà en chemin pour une jouissive correction. Il ne l’aurait pas volée, pensait-il, et bouffer ses dents lui passerait peut-être le goût des expériences foireuses. Mais le sifflement aigu d’armes à plasma qu’on charge l’avait stoppé net dans son élan, alors que deux gardes qu’il n’avait pas remarqués le tenaient en joue. Sans plus d’explications, il s’était vu traîner manu militari hors du périmètre, encore à moitié à poil, et avait vu impuissant ses espoirs de cure disparaître derrière l’épaisse porte de sécurité en même temps que la gueule de tarte du technicien.
- Prenez votre Ura… maugréa-t-il en tirant nerveusement sur sa cigarette. Si j’le choppe lui, c’est en lavement que j’vais lui coller, sa mélasse.
Après avoir garni le trottoir des mégots d’un demi-paquet de clopes, Silence finit par prendre le chemin de la Moule qui Saoule pour commencer son service, non sans un dernier regard noir au Centre de Clonage. Il ne comptait pas en rester là, quitte à faire le pied de grue pour mettre la main sur le bon docteur et lui expliquer la vie à sa façon. C’est donc l’esprit fusant de plans de torture et autres délicatesses qu’il traversa les rues, d’une démarche lente et peu assurée. Il se sentait nauséeux, et ce qui lui restait de peau semblait hyper-sensible, au point d’être gêné par le frottement de ses vêtements.
Arrivé dans son bar toutefois, il respira plus facilement. L’atmosphère sombre et négligée de l’endroit lui était devenue très familière, et il en avait définitivement besoin après ces heures passées dans un environnement aseptisé. À force de traîner dans le Sud du secteur, il en était venu à ne plus supporter ce qui était trop propre, trop ordonné. Lui-même était devenu plus voûté, et plus rude. Il avait progressivement abandonné son phrasé du centre, tout comme son maintien de fonctionnaire d’OI. Après la fadeur du Centre de Clonage, ses équipements en alliages polis et sans tâches, il prit plaisir à laisser traîner ses doigts sur le bois usé du comptoir pour en sentir les aspérités, la matière rugueuse et presque chaude au toucher. Allant s’adosser contre son mur habituel, il s’entoura d’un autre nuage de fumée et fit, du regard, le tour de la salle encore vide, jusqu’à qu’il se pose sur le container d’Ura. Il repensa un instant à l’horripilant technicien le regardant comme une expérience ratée et soupira. À priori, la procédure avait salement foiré, bien que Silence s’estimait heureux qu’elle n’ait eu aucune conséquence fâcheuse. L’autre l’avait encouragé à prendre les doses restantes d’Uranium, mais le Cyborg le soupçonnait fortement de ne l’avoir fait qu’en sachant que cela ferait danser la conga à son estomac. Il ajouta donc une idée de châtiment corporel à sa liste mentale, mais décida tout de même de tenter le tout pour le tout. Au point où il en était, après tout, que risquait-il à part d'avoir à demander qu’on l’achève ? Il prit un gobelet en plomb et, après avoir ouvert le conteneur bouillonnant, le remplit à l’aide d’une louche, plissant les yeux devant la brillance du métal liquide.
- À la guerre comme à la guerre, murmura-t-il avant d’avaler le contenu du gobelet en grimaçant.
Le deuxième shot semblait encore plus dur à ingurgiter que le premier, et il ne comprenait décidément pas que certains de ses clients puissent en consommer à la chaîne. Cette fois au moins, la fumée âcre de ses cigarettes ferait quelque peu passer le goût ignoble de la mixture.

Injection + 7 cycles
Malgré le calme plat de l’après-midi, Silence se sentait de plus en plus nerveux. Son tube digestif lui rappelait sans cesse son existence avec ses gargouillis et autres éructations que le Cyborg peinait à contrôler. Mais, à aucun moment, il n’attribua ces symptômes à autre chose que la “boisson” radioactive qu’il avait consommée. Ses bandes le démangeaient plus qu’à l’accoutumée, et la sensation allait crescendo. Plutôt d’un naturel calme bien que bourru, il comprenait mal cette nervosité qui le rendait vif et irritable. Un Gobelin fraîchement débarqué faillit en faire les frais et avaler son extrait de clonage. Car s’il n’hésitait jamais à remettre les clients au pas quand ils s’en prenaient au personnel, il dû tout de même user du peu d’énergie qui lui restait pour se contenir, en faisant comprendre au Gobelin quelques règles de bienséances du Sud sans pour autant l’encastrer dans le comptoir. Heureusement, Lenok était là pour l’aider à inculquer les bonnes manières au petit puant, permettant à Silence de ne pas céder à la pulsion de violence qu’il sentait gronder. Ainsi, quand son collègue lui amena le Gobelin par le col, au-dessus du comptoir, le Cyborg prit son ton le plus diplomate :
- J’vais t’la refaire une dernière fois, pour qu’tu piges, dit-il doucement au Gob que la prise de Lenok faisait baver, tandis qu’il agitait ridiculement ses pieds dans le vide. T’cherches la merde avec les clients s’tu veux, on bougera pas, ça fait d’l’animation.
S’approchant un peu plus de la créature qui virait au pourpre, les yeux plissés, il continua son sermon.
- Mais si j’te vois faire chier un seul employé d’la Donellys… Là, ce s’ra la totale.
- J’te taillerai en steak, et tu finiras à feu doux en ragoût, ajouta Lenok.
- Littéralement, conclu très sérieusement Silence.
Ce dernier fit signe à son acolyte de relâcher sa prise sur le Gobelin avant qu’il ne tombe en syncope, plus dégouté qu’apitoyé par les gargouillis étranglés qu’émettait le nabot en guise de réponse.
- Pfah… D’accord ! Mais j’veux des excuses de l’Elfe, fit-il en désignant Saraxielle, à peine son souffle repris.
Silence se sentait sur le point de craquer nerveusement. S’il ne sortait pas rapidement de la zone de puanteur du Gob, la petite impolitesse allait virer au carnage. Dans un dernier effort de volonté, Silence partit s’isoler dans la partie privée du bar, sur un geste las à l’attention de Lenok.
- J’te l’laisse, j’tiens plus sur mes jambes.
Il réussit néanmoins à esquisser un faible sourire de satisfaction en s’avançant dans le couloir menant bureau, sur les murs duquel raisonnaient les échos d’une correction dans les règles de l’art.

Injection + 9,10 cycles
Après un court sommeil aussi réparateur qu’un Orc armé d’une clé de 16, Silence réapparu dans la salle principale du bar, vaseux et accompagné des grondements toujours plus audibles de son ventre. Et surtout, en retard d’un bon cycle pour son dernier supplice radioactif. Aussi se hâta-t-il d’avaler sa maudite prescription dès son retour derrière le comptoir. Il ne se rappelait pas s’être senti aussi mal depuis des années. Les démangeaisons devenaient insupportables et lui donnaient envie de se dépecer à coups d’ongles en hurlant, tandis que son estomac menaçait de redécorer le bar façon macramé à tout moment. Il était plus qu’heureux d’être caché au regard des autres par ses bandages, sans quoi ils auraient probablement évoqué la possibilité de l’achever. Quand Six, la jeune Humaine qu’il formait depuis quelques heptades, s’enquit de son état, il fut à peine capable de lui répondre avec le peu de contenance qu’il lui restait. Il devait partir, vite, et le fit en titubant jusqu’à la sortie puis à travers la large place, avant de pouvoir rejoindre la rue principale. Il était pris d’une hâte instinctive, de celles qui font se précipiter vers le premier récipient à disposition pour y rendre un ragoût supposément digéré depuis 1 heptade. Dans le cas du Cyborg, ce fut une cabine du T-Cast qui accueillit son renvoi, au moment même où la dématérialisation s’amorçait. Atomisation-transfert-recomposition.
Silence s’écroula hors de la cabine à peine sa forme tangible retrouvée, s’attendant à recevoir en pleine face un flot d’Uranium bileux qui ne vint jamais. N’ayant pas le temps de s’épancher sur le sort du pauvre gars qui passerait à sa suite, il rassembla ses dernières forces pour se relever, et se traîna jusqu’à l’extérieur en rasant les murs. Deux rues à traverser, et il pourrait agoniser en paix dans son appartement.
En chemin, marchant au radar, il percuta un Nain aux contours déformés, qui malgré son bas centre de gravité partit manger le trottoir. La créature hurla quelque chose à propos de “ces foutus drogués”, mais Silence continuait déjà son chemin, plus guidé par l’habitude que par ses sens. Il sentait ses pieds s’enfoncer dans le revêtement de la route à chaque pas, et seule la haine brûlante qu’il avait pour le technicien le tint debout assez longtemps pour atteindre son abri. Sa vue lui jouait des tours, et quand il entra finalement dans une maison, il n’était pas sûr que ce soit la sienne. Cette incertitude alla croissante quand la porte de son appartement refusa de s’ouvrir, après quelques “buzz“ de refus du digicode qui vrillèrent le crâne de Silence aussi sûrement qu’une perceuse laser. Ce fut la frustration de trop pour le Cyborg, qui lâcha ses dernières forces dans une explosion de violence.
- Tu. Vas. T’ouvrir. Putain. DE PORTE ! hurla-t-il en martelant le digicode à coups de poings à réveiller tout le secteur, jusqu’à qu’il n’en reste qu’un trou grésillant dans le mur.
Un léger son pneumatique indiqua finalement que l’ouverture manuelle était possible, et Silence l’écarta juste ce qu’il fallait pour se précipiter à l’intérieur, en se débarrassant de ses trench et bandages dans la foulée. Direction l’évier. Une soif qu’il n’avait jamais connue auparavant le tenaillait, en plus de sa peau qui le brûlait atrocement. Il plongea la tête sous le courant d’eau glacée, dont le niveau monta rapidement jusqu’à l’immerger, et aspira littéralement le liquide. Il fut soulagé assez longtemps pour reprendre ses esprits, la symphonie de percussions qui résonnait dans sa tête s’atténuant. Le peu de concentration qu’il récupéra lui permit d’enclencher son synthétiseur interne de stimulant et, sentant un léger mieux, il se laissa glisser contre le bar qui faisait face à la cuisine. Pouvant réfléchir plus clairement, il tendit une main vers le deck qui reposait sur le meuble pour le faire tomber sur ses cuisses, tout en dressant une liste des symptômes qui l’affectaient. Il n’y connaissait rien en nano-technologie, mais il doutait fortement que l’injection fut totalement responsable de son état désastreux. Il se connecta donc à la matrice tant que sa lucidité l’y autorisait, et lança une recherche de diagnostic. Inflammation cutanée, vomissements, céphalées, convulsions et désorientation. Silence cria de rage à l’affichage du résultat, écartant violemment son deck. Syndrome d’irradiation, comme il s’y attendait. C’était maintenant clair : les nanites n’avaient pas consommé l’Uranium comme le technicien l’avait prévu, et le Cyborg s’était volontairement empoisonné, son corps rongé un peu plus de l’intérieur à chaque nouvelle dose. Un miracle qu’il ne soit pas déjà en cuve.
Il fut interrompu dans son flot d’insultes silencieuses, dirigées contre sa propre stupidité aussi bien qu’envers l’incompétence du technicien, par une soudaine quinte de toux qui manqua de l’asphyxier. Il sut que son futur immédiat était scellé en voyant sa main mouchetée de sang. Son état se dégradait à vue d’oeil, et une nouvelle décharge de stimulant eut autant d’effet sur lui qu’un pet de Nain sur une plaque de verglas. Il refusait de crever la gueule ouverte de cette façon, car son agonie pouvait encore durer des heures. En revanche, il devait agir vite, car il deviendrait impotent bien avant de calancher. Mais avant qu’il puisse s’emparer de son communicateur, une nouvelle convulsion l’envoya à terre, prostré, ses organes semblant bien décidés à fuir sa carcasse. Il se redressa en grognant, son débardeur souillé d’un liquide à l’inquiétante teinte rougeâtre. Reste concentré, juste encore un peu, se répétait-il alors qu’il peinait à rédiger un message sur l’écran tactile poisseux de sang. Six. Six saurait quoi faire, ou en tout cas n’hésiterait pas un instant à abréger ses souffrances. La réponse à sa transmission à peine compréhensible arriva presque instantanément: elle était en chemin. Il laissa donc son com’ s’échapper de sa main, et tâta mollement ses poches à la recherche de la clope du condamné. Il en trouva une à moitié tordue et humide de sang, tout comme le zippo qu’il tentait sans succès d’allumer.

Injection + 10,2 cycles
Six dû lutter brièvement avec la porte pour s’introduire dans l’appartement, où elle ne vit aucune trace de Silence jusqu’à qu’un “tchac-tchac“ répétitif l’attire derrière le comptoir. Le Cyborg était resté dans la même position, actionnant du pouce la roulette de son briquet plus par réflexe que réelle conviction, ses yeux vides rivés sur une autre dimension. La jeune femme ne l’avait jamais vu sans ses bandages et encore moins dans cet état, aussi resta-t-elle figée sur place sans comprendre ce qu’elle voyait. Une violente quinte de toux fit sortir Silence de sa torpeur et Six de son immobilisme. Elle s’agenouilla d’un coup auprès de lui, fouillant sa sacoche.
- Hey…Fillette, lança faiblement le vieux entre deux rejets de poumons.
- Hey fillette ? , répliqua-t-elle vivement. Tu pisses le sang comme pas permis, et tu m’sors un “hey fillette” ?!
Silence lui présenta un pitoyable sourire ensanglanté pour toute réponse, planté au milieu de sa figure scarifiée, son crâne chauve perlant de sueur.
- Rhaa ! grogna-t-elle en farfouillant dans son sac.
- Keuh… M’ont bien arrangé ces…
Il ne finit pas sa phrase, sa tête tombant soudainement sur sa poitrine. Six abandonna sa fouille pour la redresser, essayant de maintenir par une épaule le corps massif du Cyborg contre le meuble.
- Hep hep hep ! , s’exclama-t-elle en lui tapotant le visage pour le tenir éveillé. Dis-moi déjà c’que t’as foutu, avant de te plaindre comme un Gob aigri.
- C’pas une illusion cette fois, hein ?
- Nada.
- Rrrrm…, grogna Silence. L’Centre de clonage. Y suis allé pour… trait’ment. Complèt’ment…f-foiré.
- Hormis si l’traitement consistait à t’foutre en l’air, en effet, c’foiré. Tu peux bouger ?
- Gnn… Chais pas…
S’appuyant sur sa prothèse, Silence parvint à bouger juste assez pour que Six passe un bras sous le sien et l’aide à se remettre sur pied. Il posa immédiatement une main sur ses yeux pour empêcher la pièce de tourner et, si parler était un supplice, il tenta quand même d’expliquer la panade dans laquelle il se trouvait.
- I-injection de… nanites, bredoulla-t-il. D’vaient… Effacer les stig-mates, up-upgrade des…
- T’pouvais pas te contenter de trouver des bandages gratos, hein ?
Son ricanement fut presque inaudible, et lui fit tousser plus de sang alors qu’il dû se rattraper au comptoir pour ne pas s’effondrer.
- C’est… C’te merde d’Ura… Irradié. D-evait nourrir les na…nites.
- Bon, faut essayer de virer les radiations, dit-elle en réinstallant le Cyborg au sol. Tu connais un toubib ?
- N-nan…
Six grogna de frustration.
- Rhaa… J’y connais foutrement rien ! Hormis t’buter, j’vois pas bien en quoi j’peux t’aider, là.
- J’crois… J’crois que L…
Il fut interrompu par une nouvelle crise qui le jeta à quatre pattes, vomissant tripes et boyaux. Six recula d’un pas en grimaçant, de dégout autant que d’impuissance. Se laissant glisser contre le mur, paraissant réfléchir à toute allure, elle finit par s’emparer de son com’. Mais Silence ne lui laissa pas le temps d’appeler du secours. Tout ce que son corps comportait de synthétique s’était mis à vibrer, et les prothèses apparentes à se déformer. Six bondit, son magnum pointé sur le Cyborg à peine sur ses pieds :
- Ah…Pu…tain ! Qu’est-ce que…, grogna-t-il secoué de toutes parts.
- Si je t’envoie en cuve, c’te saloperie dégagera ?!
- Chais… Pas !
- Pas le temps de tripatouiller du cul ! s’exclama la jeune femme, appuyant sur la détente après une brève hésitation.
Mais au dernier moment, Six dévia son tir qui frôla la tête de Silence, bouche bée devant le spectacle qui se déroulait devant elle : le corps du Cyborg crépitait d’énergie, tandis que son crâne se couvrait à vu d’œil d’un fin duvet blanc. Lui serrait les mâchoires à s’en faire péter les dents, ses grognements se muant rapidement en un râle profond alors qu’il essayait malgré tout d’articuler :
- S…Six… Re…CULE !
- Qu’est-ce que… !
L’Humaine recula en cherchant le mur à tâtons sans pouvoir quitter le phénomène des yeux, laissant son arme tomber, complètement dépassée par la situation.
- Putain, SILENCE !
Ce denier n’entendait n’y ne voyait plus rien. Chaque parcelle de son être en feu, il était paralysé par une douleur telle qu’elle faisait passer l’accident responsable de son état pour un séjour dans un spa Elfe. Il luttait de toutes ses forces sans savoir contre quoi, jusqu’à qu’il perde le contrôle total de sa carcasse en ébullition. Six le vit se relever comme une marionnette, le visage pétrifié dans un cri silencieux, ses membres cybernétiques enflés et mouvants.
Six glapit en se laissant glisser contre le mur pour se recroqueviller, tétanisée par la scène. Parcouru de fins arcs énergétiques, Silence ne pouvait que fixer, impuissant et terrorisé, son bras enfler jusqu’à se déstructurer, son nez pris d’assaut par l’ozone que dégageait la réaction en chaîne. Chacune de ses veines gonflée et palpitante, il pressentit avec horreur que son corps était littéralement sur le point d’exploser, alors que ses prothèses semblaient animées d’une vie propre. Au prix d’un effort de volonté surhumain, il recula de quelques pas pour s’éloigner de Six qui, dans un sursaut de conscience, fit de même en rampant à moitié, sans pouvoir détourner son regard.
- Putain Sil’, t’as foutu quoi, marmona-t-elle pour elle-même.
Silence eut juste le temps d’aboyer un avertissement quand il sentit l’afflux d’énergie gagner en puissance, dans un brusque pic qui menaçait de rompre le faible confinement de son corps déchiré.
- S… Six… Pl… 01000001 01001110 01110001..ue-TOI !!!
- Eh merde !
La jeune femme, le souffle court, détala hors de l’appartement à la dernière seconde, tentant désespérément de refermer la porte derrière elle quand l’inévitable se produit. L’espace d’une seconde, elle aperçut une véritable tornade de métal et matières composites qui fouettaient l’air autour de son mentor, avant d’être éblouie par l’éruption soudaine d’énergie brute.
Dans une dernière secousse affolée, elle ferma la porte coulissante sur les hurlements du Cyborg qui se joignaient à la cacophonie explosive, avant de se recroqueviller au sol en gémissant.
Puis, aussi vite qu’il s’était manifesté, le maelstrom se dissipa en ne laissant qu’un silence de plomb.

◊ Commentaires

  • Medea (153☆) Le 20 Février 2013
    Ma pauvre Six. smiley
  • Medea (153☆) Le 26 Mars 2013
    Elle viendra d'ici peu en toute logique. ^^
    Mais oui, on veux la suite !