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Innerworld - Elyahsin

Je ne m’en rendais plus compte, quand mon subconscient m’emmenait dans cet entrepôt, dont la dégradation semblait en suspend dans le temps. Comme si mes jambes se mettaient en marche, bien avant que mon cerveau le leur ordonne. Aussi, je fus surprise quand la porte de la cage d’ascenseur branlante se referma dans un bruit de ferraille brinquebalante. Ce ne fut qu’après deux tentatives que l’ascenseur se décida enfin à entamer son ascension. Comme toujours, mon regard dériva vers les sous-sols. Un grondement bas, si bas qu’on aurait pu le confondre avec le ronflement du tonnerre se fit entendre. Mes poils se hérissèrent sur mes bras, me poussant à me cramponner sur la rambarde de métal froid à la peinture rouge écaillée qui faisait le tour de la cage.
Sur l’ascension, mon regard capta quelque chose de déjà-vu. Une silhouette prostrée et enfermée derrière des barreaux. Maigre et décharnée, dont l’éclat rouge de ses cheveux avait ternis. Un regard triste, fou et désespéré, implorant, croisa le mien. Mon cœur se serra. J’avais beau la voir chaque jour dans la glace dernièrement, je la méprisais autant que j’étais désolée pour elle. Et je m’en voulais de la laisser ainsi exister.
L’ascenseur s’arrêta face à une porte d’un blanc délavé, ornée d’argent. Des feuilles et des fleurs en reliefs couraient autour de la poignée, ou venaient embrasser chaque arche, chaque angle. Des fleurs d’un blanc pur entouraient cette porte ouvragée, qui semblait être sa propre source de lumière. Une lumière étincelante.
Aussitôt, j'eus une idée de ce qui m’attendait derrière cette porte, et j’hésitai à l’ouvrir. Aussi belle que soit cette porte, ce qui attendait de l’autre côté était équivalent en nostalgie et tristesse. Encore un moment raté de ma vie. Mais la porte s’ouvrir sans que j’y pose la main. Quoi que je fasse, je ne pouvais pas y échapper.
Le Pinatubo. Encore. Une soirée tranquille. J’étais installée dans l’un des canapés rouges. J’étais jeune, belle, et déjà si calme et observatrice. Je me drapais d’ombre tandis que ma voisine, elle, rayonnait. Sa chevelure blanche, sa peau claire, ses yeux pétillants, et ses formes généreuses, ne faisaient que mettre en valeur sa personnalité colorée. Elle aimait jouer les ingénues, innocente de l’effet de ses charmes sur les hommes. Et pourtant, il ne m’échappait jamais qu’elle en jouait, subjuguant la gente masculine qui n’avait plus d’yeux que pour elle. Tandis que moi, je me glissai volontiers dans l’ombre qu’elle projetait, comme pour assurer ses arrières et me délecter d’attirer si peu l’attention.
Et nous étions amies. Mais je l’aimais comme une sœur.
Mais je savais trop bien que l’attachement était dangereux. Qu’un jour, nous nous éloignerions. La vérité était que je craignais d’en souffrir. Aussi, il m’arrivait de faire deux pas en arrière quand elle en faisait un vers moi. Et, j’ai conscience que cette forme de rejet ait fini par la blesser.
« J’aimerais que nous soyons sœurs. »

Je n’ai rien répondu. Rien de consistant. Rien de ce que j’aurais dû. J’ai vu son visage, son léger sourire. Elle se livrait à moi, montrait de la vulnérabilité. Et, par pur égoïsme, par peur, je ne l’ai pas accueillie à bras ouverts.
J’ai eu peur, Ely. Peur d’être malheureuse sans toi. Si j’avais dit oui, ce jour-là, serais-tu toujours vivante ? Serais-tu avec moi, ma sœur ?
Une tempête vint balayer le souvenir. Tout s’assombrit et se dégrada. L’électricité dans l’air était palpable, des étincelles rouges éclataient en gerbes, n’augurant rien de bon.
Je le vis lui. Et elle. Je les vis avec mes yeux d’innocente de l’époque. Je le vis nous séparer, en chantant les louanges d’une, puis de l’autre. Je le vis créer jalousie et discorde dans notre duo pourtant si parfait. Qu’y avait-il de plus compatible que l’Ombre et la Lumière, Ely ?
Je te vis déployer toute ta magnificence pour capter son attention, jusqu’à ternir lentement, désespérée, blessée qu’il ne te remarque pas plus. Je t’ai vue consumée par l’amertume parce qu’il m’accorda plus de faveurs qu’à toi. Je t’ai vue te laisser corrompre par le ressentiment, agir en mal et le regretter instantanément.
Et je me suis vue, sans pitié, et sans compréhension pour toi, te considérer froidement, me persuader que tu étais la seule fautive, et que je n’avais besoin que de lui. Si seulement j’avais su qu’il y avait plus de bonheur à rester auprès de toi qu’auprès de lui.
Je t’ai vue t’éteindre de loin, lentement. Devenant l’ombre de toi-même, au bras de notre ami. Vous vous êtes laissés mourir tous les deux, en essence, même si te concernant, je ne retrouve plus trace de ton visage dans mes messages.
Et un jour, tu es vraiment morte. Un jour, tu as cessé d’exister. Une part de moi s’est effondrée.
Je me souviens avoir passé de longues heures et de nombreuses nuits dans ton cercle, qui n’appartenait plus qu’à un inconnu, dont les couleurs claires me rappelaient tes yeux ou ta chevelure. Etais-je en deuil ? Probablement. Peut-être que je sentais encore ta présence entre ces murs. Peut-être que ces coussins sentaient encore ton parfum.
Je suis désolée, Ely. Mais je te promets que chaque fois que je passerai les portes de la ville, j’emmènerai avec moi ton souvenir et celui d’Ozkar dans chaque aventure. Ainsi, nous serons enfin dehors, tous les trois, comme nous l’avions prévu.
Je dû quitter la pièce, après que cette tempête rouge ait tout déchiqueté sur son passage. En reprenant l’ascenseur, la porte se referma… Mais cessa de rayonner. Et les fleurs fanèrent. Le bois se ternis, l’argent rouilla. Je compris que cette porte ne se rouvrirait plus jamais.

Alors je suis redescendue, et avant que je puisse mettre la main sur la porte de la cage de l’ascenseur, je rouvris les yeux.
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Une autre partie de la vie marquante de ce modeste pion. Merci à JD Elyahsin d'avoir marqué ce perso. Son portrait est approximatif j'en conviens, mais dans mon souvenir, ça lui correspond plutôt bien.

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