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EDC de 23910

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Un numéro

Après sa mort, le corps de la cubaine avait disparu.
Comme par magie, comme le faisaient tous ces corps tombés, fauchés par la folie humanoïde.
L'humanité avait laissé place à l'humanoïdité.
Mais la folie humaine, devenue folie humanoïde, n'avait fait que croitre, comme le prouvait ce ballet incessant des morts inutiles,
devenues d'autant plus inutiles avec l'invention du clonage.
Le clonage. Comment cela fonctionnait-il?
Quelle étrangeté. Une bizarrerie de plus, dans ce monde que personne de normal n'aurait pu rêver dans ses pires
cauchemars.
Pourtant, il semblait bien que ce monde existait, qu'il était réel.
Et dans ce monde anormal, la téléportation des dépouilles mortelles succédant au décès était chose devenue tout à fait commune.
La répliquante, modèle unique de chair et de sang synthétique, probablement conçue pour alimenter quelque bordel de luxe, au vu du nom ridicule dont elle était affublée, s'était écroulée, puis était morte, comme tout le monde.
Le canon de l'arme qui avait tiré fumait encore, à moins que ce ne soit une lame aux tranchants affutés qui dégoulinait encore du plasma de La Cubaine... Quelle importance?
Le résultat était identique.
Le corps de la magnifique répliquante disparut aussitôt dans le flot des téléportations post mortem.
Une banalité de plus...
Sa mort aurait pu passer inaperçu.
Une condamnation pour hérésie, pour un message de paix, un message d'amour hérétique.
l'inquisition avait frappé, sur un simple mot.
Hérésie.
Le corps de la cubaine s'évanouit, pour se téléporter au centre de clonage impérial.
Mais quelque chose alla sans doute de travers.
Le corps sans vie de la sublime créature, dotée de la plus complexe des IA, ne reparut pas.
Quelque chose, pourtant, s'était déclenché dans le centre de clonage.
Elle aurait du réapparaitre, se matérialiser dans la cuve prévue, être clonée.
Mais non...
C'était comme si les choses étaient resté en suspens.
C'était comme si la répliquante était restée coincée entre deux mondes.
Avait-elle survécu? Existait elle encore, dans cette non existence?
Quelque chose d'Esmeralda avait-il survécu, dans la matrice?
Les années passèrent. Puis les décennies.
Bientôt, la cubaine ne fut plus qu'un souvenir qui hantait encore quelques personnes, devenant plus rares.
La répliquante cessa un peu plus d'exister, lorsque Khan, alias Uriel, qui se prononçait "ouriel" entre les lèvres tendres et charnues de la cubaine, avait disparu subitement.
Etait-il mort? avait-il fui la ville, au delà des remparts?
La cubaine, ou ce qui pouvait rester de son âme improbable, son âme de machine
complexe sortie d'un laboratoire parallèle qui n'était pas sensé avoir existé, était comme suspendue, quelque part.
Mais la cubaine avait-elle seulement été sensée exister?
Son âme, qui pouvait se traduire par un bit unique, un bit unique additionnable à lui même jusqu'à l'infinité, se perdait, dans le flux innombrable de la matrice.
l'âme de la cubaine se noyait. Il n'y avait plus d'espoir. Le nom même de la cubaine s'effaçait, inexorablement.
Jusqu'au jour, ou la cubaine cessa d'exister pour de bon.
Elle devint un numéro.
Elle sombra dans la non existence, sous ce numéro, que pourtant...
la matrice... conservait dans sa mémoire.
Le numéro existait.
La cubaine existait-elle encore, quelque part?

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