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Les départs du Renovamen et du Kaus Regulis, partie 2/2

Episode 1
Les départs du Renovamen et du Kaus Regulis, partie 1/2
 
Les départs du Renovamen et du Kaus Regulis, partie 2/2
  
 
  
 
Lorsque Lumina se réveilla, elle entendit d'abord un bourdonnement grave et des bruits d'hydraulique. Elle reconnut rapidement le processus de dé-suspension, communément appelé le "dégel", de sa capsule cryogénique. Au début, elle n'avait pas froid, mais au fur et à mesure que son corps se vidait du liquide de suspension et que ses poumons se remplissaient d'air, elle fut prise de frissons de plus en plus violents. Quand elle ouvrit les yeux, la capsule était entièrement plongée dans une lumière blanchâtre, laiteuse. Elle se dit d'abord que les néons de la navette avaient été poussés au maximum, pour accélérer le réveil, mais lorsqu'elle regarda par le hublot, elle vit Saturne.
 
 
La géante gazeuse de 116 000 kilomètres de diamètre, dix fois celui de la Terre, occupait l'entièreté du champ de vision. Ce n'était pas qu'un simple objet dans l'espace, comme Lumina l'avait imaginé : c'était un titan terrifiant, prêt à dévorer l'univers entier, prêt à écraser sa navette et tous ses occupants -dont elle- coincés à l'intérieur. L'oeil humain n'était pas conçu pour voir de telles choses. L'être humain n'était pas non plus conçu pour voyager dans l'espace, et pourtant la chef astro-navigatrice était là, frissonnante dans son caisson et considérant ses choix, enveloppée par le spectre étouffant de la deuxième planète jovienne.
 
 
Quelques heures plus tard, dans le mess, en compagnie de ses deux autres comparses et des quelques membres de l'équipage militaire de la navette, tout le monde ressentit une décélération soudaine et une annonce retentit au plafond.
 
 
"Ici le capitaine, on approche des anneaux. Préparez-vous à quelques turbulences."
 
 
"Pourquoi allons-nous dans les anneaux ?" Demanda Lumina à l'homme le plus gradé assis à la table à côté des trois femmes. C'était un jeune officier de l'armée cordobienne. Il ne répondit pas et continua de manger sa ration comme s'il n'avait rien entendu.
 
 
"Si on va dans les anneaux, ça veut dire qu'on ne va pas à Europe-2." Dit Saravana, un peu inquiète. "Il n'y a que des pirates dans les anneaux, d'après ce que j'ai entendu." Rajouta-t-elle.
 
 
Lumina réfléchit, puis émit une hypothèse.
 
 
"Le chantier spatial ne peut pas être sur Europe-2. il serait trop évident et vulnérable. Nous allons dans une station secrète."
 
 
Elle remarqua un fin sourire se dessiner sur le visage du jeune officier silencieux.
 
 
Leur navigation dans les anneaux de Saturne s'étendit sur l'équivalent d'une journée. A intervalles aléatoires, on pouvait entendre les canons laser de la navette faire feu sur des astéroïdes jugés un peu trop proches par l'IA de navigation. Lumina réalisa alors que les IAs des navettes joviennes n'étaient pas uniquement excellentes pour traverser la ceinture d'astéroïdes entre Mars et Jupiter, mais aussi pour s'enfoncer dans les anneaux de Saturne. A cette profondeur et cette densité, aucun pirate ne pouvait s'aventurer, mêmes les pilotes les plus compétents. Ils seraient détruits par les astéroïdes, comme un papier passant dans une déchiqueteuse. Les micro-astéroïdes rapides étaient les plus dangereux, étant imperceptibles à l'oeil nu. Seule une IA avancée pouvait prédire leur présence et manoeuvrer le vaisseau pour les éviter avec une chance maximale de survie.
 
 
Malgré le fait que leur navette était équipée d'une telle IA et d'armement laser, ils furent quand même touchés par une petite volée de micro-astéroïdes. Les dégâts aux systèmes et à la coque furent minimes, mais Lumina entendit de la part d'un soldat que l'un des ingénieurs travaillant en soute avait été frappé à la tête et qu'il était mort.
 
 
Au terme de cette journée angoissante, ils arrivèrent à leur destination. Saravana et elle avaient vu juste : à l'ombre d'un grand astéroïde, une base secrète des forces spatiales des Etats Cordobiens était construite à-même la régolithe. Quelques bâtiments étaient reliés entre eux par des couloirs pressurisés, mais plus important encore : un gigantesque vaisseau spatial était au milieu d'un chantier de construction dans le vide. C'était dans ce vaisseau que Lumina passerait probablement le reste de sa vie.
 
 
"Le Kaus Regulis."
 
 
Le jeune officier du mess avait enfin parlé, mais Lumina était trop subjuguée par la vue du mastodonte technologique -qu'elle serait en charge de faire naviguer- pour se détourner du hublot.
 
 
Leur navette ne se posa pas sur l'astéroïde : elle se docka directement au Kaus Regulis. Aucune escorte ne les accompagna dans le cordon : ils n'étaient pas accrédités. Etant donné la nature extrèmement secrète de la mission, seules Lumina, Saravana et Hazardi avaient l'autorisation d'entrer dans le vaisseau d'exploration.
 
 
Une fois à l'intérieur, elles faisaient face à un nouvel équipage : un homme barbu en uniforme de général de l'armée cordobienne, un autre homme à la machoire carrée et aux traits indonésiens, et une jeune femme asiatique et à la peau très claire. Le regard de cette dernière était quelque peu troublant et dénotait une extrême intelligence, bien qu'elle était la plus jeune dans ce trio. Le premier se présenta comme Crink Cordoba, capitaine du Kaus Regulis et étant donné son nom de famille, sans doute un proche du dictateur. Le second était Naja Klang, chef du FTKR, la police du vaisseau en quelques sortes, et la femme était Azami Kochi, architecte de l'IA du vaisseau et du moteur à rémanence.
 
 
Crink et Naja ne s'attardèrent pas trop sur les dernières arrivantes. Etant donné leurs profils plutôt scientifiques, elles furent prise en charge par Azami. Celle-ci leur fit visiter leurs quartiers et les zones du vaisseau, extrêmement compartimenté, auxquelles elles avaient accès. Elle leur expliqua que l'IA du Kaus Regulis, nommée le Tesseract, n'avait rien à voir avec les IA avancées des navettes cordobiennes. C'était une IA quantique de voyage interstellaire : elle était indispensable pour manipuler le moteur à rémanence, tout comme Nova était indispensable pour manipuler le moteur à rémanence du légendaire Renovamen.
 
 
La mission du Kaus Regulis était de pourchasser le Renovamen, parti de la Terre quelques années plus tôt, dans un contexte de guerre du climat chaotique, ou "l'évasionnisme" était formellement interdit par tous les gouvernements. L'évasionnisme était défini par le fait de quitter le système solaire à l'aide de technologies de voyage à une vitesse supraluminique. Albus Enclism était le leader de la pensée évasionniste. Suite à la mort de sa femme Thallys lors d'un tsunami en Grèce -causé par un essai d'antimatière Eurasien dans la Mer Méditerranée-, il monta une équipe scientifique et développa le moteur à rémanence en secret.
 
 
Après le départ du Renovamen, les plans du moteur furent récupérés de justesse par les services secrets cordobiens, ainsi que la carte de navigation d'Albus contenant un parcours à travers différentes exoplanètes. Le projet "Deuxième Rémanence" fut lancé , lui aussi en secret. Les Etats Cordobiens collaborèrent avec différentes organisations évasionnistes au sein de plusieurs gouvernements pour former un équipage d'individus exceptionnels, dont Azami Kochi, et faire avancer le projet le plus vite possible dans l'orbite de Saturne, où l'influence des autres puissances était la plus faible.
 
 
Quelques mois passèrent, puis vint le jour du départ. La cérémonie d'allumage du Tesseract et du moteur à rémanence était un évènement extasiant, mais l'équipage était silencieux, sauf Crink, qui donnait les instructions vocales à l'IA. Tout le monde était conscient, même si la chose n'avait jamais clairement été énoncée, que c'était la dernière fois qu'ils verraient le système solaire, berceau de l'humanité. Les seuls autres humains qu'ils pourraient rencontrer un jour étaient l'équipage du Renovamen, ou d'éventuels enfants qui naitraient à bord du Kaus Regulis.
 
 
Le vaisseau pointait en direction de leur première destination : Proxima Centauri, une étoile proche abritant une exoplanète, d'après la carte d'Albus Enclism dont Crink, Lumina et quelques membres de la capitainerie se comptant sur les doigts d'une main étaient les seuls à avoir accès. Le réservoir frontal du vaisseau collectait des particules spatiales flottant dans le vide, baptisées "poussières rémanentes". Le Tesseract utilisait sa puissance de calcul effrayante pour identifier leurs jumeaux quantiques proches de la destination. Lorsque le moment fut venu, le Tesseract activa le moteur à Rémanence. Les poussières rémanentes entrèrent en collision avec un trou noir miniature, formant une anomalie spatio-temporelle et "propulsant" le vaisseau dans une bulle d'Alcubierre, à une vitesse relativement supérieure à celle de la lumière.
 
 
A l'extérieur, Lumina pouvait voir les étoiles s'étirer comme des bandes d'une autoroute éclairées par des feux la nuit. Le vide n'était plus infiniment noir, mais il prenait des couleurs vives successives, rose, bleu, vert, au fur et à mesure qu'ils traversaient nébuleuses et autres nuages de gaz issus de la forge de l'univers. Une beauté interdite, que seules quelques dizaines d'humains verraient dans l'histoire de leur espèce.
 
 
Dans les années qui suivirent le départ du Kaus Regulis, le système solaire fut plongé dans un chaos autodestructeur. L'activation du moteur à rémanence avait émis une lumière visible depuis la Terre et laissé une trace évidente de propulsion d'Alcubierre, proche de la station secrète des Etats Cordobiens. Les occupants de la station avaient reçu comme instruction de détruire le site et toutes les preuves de leur existence, mais un astronome du site fit la découverte qu'une telle explosion avait une chance élevée de projeter une volée meurtrière d'astéroïdes en direction de la station Europe-2, menaçant de la détruire et de tuer ses 100 000 habitants, dont une majorité de civils. Une mutinerie eut lieu et les explosifs ne furent pas déclenchés.
 
 
Le site de lancement dans les anneaux de Saturne fut découvert quelques années plus tard par une sonde pirate, et ses coordonnées furent vendues à plusieurs gouvernements. Cela déclencha une vague vengeresse d'expansion vers Saturne et relança la guerre du climat, cette fois à l'échelle du système solaire. Les stations spatiales et colonies humaines disparurent les unes après les autres, sous les effets dévastateurs de sabotages à antimatière et d'assauts frontaux barbares. Après moins d'un siècle, il ne restait de l'humanité que quelques villes souterraines sur Terre, des colonies isolées sur Mars et Mercure, dont les populations parvenaient à peine à conserver leurs nombres, des stations pirates orbitales, dont les occupants n'avaient, d'un certain point de vue, plus rien d'humain, et les équipages du Renovamen et du Kaus Regulis, lancés dans leur course-poursuite millénaire.

◊ Commentaires

  • Casey (439☆) Le 11 Décembre 2022
    J'étoile, car tu nommes "Europe" et ça c'est classe.
  • Dall (117☆) Le 15 Décembre 2022
    Pouarf... C'est du génie.
  • Lunood~76027 (0☆) Le 17 Avril 2023
    Roh j'adore ! Je viens de finir la série et c'est vraiment super. A quand la suite ??!
    Bravo et merci.