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Deuxième quatrain : L'art de la friponnerie

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
1'

Il y a des jours où nous ferions mieux de rester coucher. Il y a ceux dont la perspective nous trouble tant que la nuit précédente se solde d'insomnies. Et puis il y a aussi ceux qui nous rappellent que parmi nos bonnes résolutions de l'année passée, il y avait celle d'apprendre à dire non.
"Tu serais partante pour une expédition dangereuse ?"
Stop.
Le communicateur était resté en suspens dans les petites mains d'une technicienne encore peu remarquée. Des épaules moins larges que la moyenne naine, un visage fermé à l'expression franchement refroidissante, des yeux sombres à l'affût de la moindre attitude irrévérencieuse et des oreilles un peu trop mobiles, discrète trahison anatomique d'une ascendance douteuse.
Ca, c'est pour la description de la suiveuse.
Quant à l'instigateur de cette vaste bévue, comme ils devaient le constater plus tard, celui-ci était d'un profil bien plus banal. Ou pas. Baroudeur aux cheveux en bataille. Grognard. Revanchard. Mais aussi brindille à laquelle on n'avait pas laissé le temps de devenir solide branche.
Ils étaient deux. Un plan. De quoi d'autre avaient-ils besoin ?
"Deux fois plus dangereuse si je ne t'accompagne pas, j'imagine ? Où dois-je me rendre ?"
Première erreur... et menteur celui qui trouverait dans la seconde question une circonstance atténuante à la naine qui n'avait su dire non.
Car en réalité, elle imaginait déjà fort bien sur quel type de terrain l'aventurier souhaitait jouer, et malgré cela, elle l'avait suivi. Il y avait certainement eu l'excitation due à l'inconnu, celle due au danger et au dessus de toutes celles-ci, la curiosité d'enfin se rendre dans ce lieu où nulle vie ne subsistait, ce lieu presque légendaire. Son travail ne portait sur rien d'autre que l'étanchéité entre la surface et ces territoires inexplorés. Alors, finalement, cette descente... ça n'était rien de plus qu'un stage de découverte professionnelle. Non ?
- De multiples commandes de deck plus tard -

Ils avaient échangé. Un regard, une vanne, une oreillette. Et puis, après mille précautions, il était descendu. Elle, arbalète à la main, s'assurait qu'ils ne soient pas suivis. Ses sourcils se fronçaient néanmoins à mesure que le temps passait. Au fond d'elle-même, elle était persuadée qu'il faisait cela pour l'effrayer. Mais tout de même elle croisait les doigts en espérant qu'aucun brouilleur n'ait coupé la communication et que ce silence n'annonçait pas qu'il se concentrait sur un combat perdu d'avance. La voix féminine se fit pressante.
"Alors ?"
Et comme il ne répondait toujours pas, elle sauta à sa suite. Quitte à mourir, autant qu'ils y aillent à deux et ne fassent pas les choses à moitié.
"C'est bon."
Il avait prononcé les mots juste avant qu'elle n'atterrisse. Aussi le fusilla t-elle du regard dès qu'elle eut touché le sol.
"Tu m'entraînes tout le temps dans des plans pourris ! Vraiment, les civis..."
Mais malgré l'agressivité de ses paroles, un sourire frivole étira finalement ses lèvres. Ils continuèrent à se chamailler tout le long du chemin, lui le nez dans sa carte, elle balayant les alentours de la pointe émoussée d'un carreau habituellement utilisé pour l'entraînement.
Avais-je omis de préciser qu'ils étaient en plus descendus désarmés ?
*2'
Ils n'étaient au fond que deux jeunes cons plus dangereux pour eux-mêmes que pour n'importe quelle faction.
La situation commença à réellement mal tourner lorsqu'ils quittèrent les zones éclairées pour s'engager dans des passages obscurs, objectif de l'expédition, où ils tournèrent longuement en rond en se heurtant à des murs invisibles, sans que cela ne les mène nulle part.
La pénombre dans laquelle ils étaient plongés était totalement impénétrable. D'ailleurs, la naine ne cessait plus de cligner machinalement des paupières, car ne rien distinguer autour d'elle lui était peu commun. Ses yeux, sans être aussi perçants que ceux d'un elfe, lui permettaient tout de même d'y voir bien clair la plupart du temps. Ici, ils ne réussissaient pas à capter suffisamment de lumière et lui demeuraient ainsi parfaitement inutiles. Elle avait donc rangé son arbalète et progressait à tâtons. Son acolyte marmonnait de temps à autre, elle lui répondait sur le même ton, et ainsi ils se suivaient sans se perdre.
"C'est maintenant évident : tu ne sais pas compter nos pas. Donne moi ta carte."
- Quelques instants plus tard -

"Sas Impérialiste immédiatement. Vous avez 1 minute."
"Ca va être compliqué, sergent..."
"Ce n'est pas mon problème.
Perdus qu'ils étaient dans leur exploration, ils n'avaient pu se tenir au délai communiqué. Le sous-officier était descendu les accueillir et, croyez-moi, la rouste avait été mémorable.
_____________________________
  • 1 Extrait du dormeur du val, d'Arthur Rimbaud.
  • 2 Edit ajout du 25 Août 2022 avec intégration d'une suite demeurée non publiée car je n'en ai jamais terminé la rédaction. Puisque c'est trop court pour constituer un article en soi, je la remets à la suite de l'histoire à laquelle elle était liée.

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Puisque nous y sommes
28 Janvier 2013
902√  3 6

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◊ Commentaires

  • Valmont (178☆) Le 28 Janvier 2013
    Je peux pas ne pas aimer ce texte. Pour la référence à Rimbaud, pour l'histoire racontée, pour la chouette soirée de RP avec Dall. Cool d'en avoir fait un texte, qu'on en garde une trace!
  • Dall (117☆) Le 28 Janvier 2013
    Franchement... Dès qu'on passe les 20 en furtif, go y retourner !!
  • Swan~3150 (689☆) Le 28 Janvier 2013
    Tsss... Swan veille smiley
  • Dall (117☆) Le 28 Janvier 2013
    On s'en fout on est des warriors ! *se cache derrière Val*
  • Dall (117☆) Le 25 Août 2022
    Et j'en remets en bonus. Je sais, je sais, je régale.