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Sociabilisation

Je m'endors sur mon deck, je me réveille et je me glisse sur la matrice, ma vie est exactement comme je le souhaite. Je travaille afin d'économiser et pouvoir m'offrir un clone plus perfectionné que celui qui est enregistré en ce moment au centre de clonage. Je sors parfois pour m'alimenter et je rencontre quelques personnes.
J'ai peur que l'on me touche, je ne supporte pas ça. Dès que l'on s'approche de moi, j'ai les plumes qui hérissent, je respire comme dans un nuage de fumée et tous mes sens sont en alerte afin de réagir si la proximité devient plus étroite. Je n'aime les lieux pleins de monde, pire je déteste ceux qui tendent la main ou font des bises. J'en ai des nausées.
Seulement les gens pensent toujours savoir ce qui est le mieux pour vous. Voilà donc que les seules personnes que je côtoyais m'ont dit de délaisser mon deck et d'aller à la rencontre des gens "pour mon bien". Comme s'ils savaient ce qui est le mieux pour moi, même moi je l'ignore.
Comme je ne suis pas fermée et que je sais que j'ai encore beaucoup à découvrir, je sors, je me rends dans un bar. Il y a peu de monde et c'est idéal pour un début. C'est ce que je croyais du moins. Je fais la connaissance d'un humain plutôt sympathique, mais je continue à me servir des réseaux de communication pour parler avec ceux que je connais déjà. Là encore on me dit que je peux très bien parler de vive voix. Décidément être un vautour c'est pas très bien vu par ici. On doit se comporter comme les humains et autres racés inférieurs, parler et singer ceux qui nous entourent.
Je suis une bonne NA, je m'adapte et je laisse la chance aux bien pensants de me prouver que j'ai tort. Rapidement je me sens à l'aise dans l'échange de mots, ce vautour en qui j'ai confiance me délie la langue, cependant je ne peux m'empêcher de lui parler via communicateur en même temps.
Le râleur d'androïde fait son grand retour, toujours aussi chaleureux que sa carcasse sortant de cryo. Jusque là, rien de déplaisant dans ma sociabilisation, même cet énergumène à INA, on s'habitue. Je me rends vite compte qu'il n'y a pas grande différence entre un deck et les gens. Il y a des échanges stériles et des échanges plus intéressants.
Enfin c'est ce que je pensais au plus profond de moi. Je suis dénuée de sentiments, la machine qui me sépare des autres me sert de barrière, seulement quelqu'un en avait décidé autrement. Je devais faire cette merde de sociabilisation et je ne m'en sortirais pas indemne.
La différence m'a sauté à la gorge. Quand on n'a plus de bouclier sous forme d'appareil, les sentiments naissent, quelque chose de prenant, quelque chose de désagréable que l'on ne contrôle pas. Ce vautour me l'a appris à mes dépends, me faisant découvrir la peine, la honte mais surtout l'empathie, le pire des sentiments qui soient. A tout cela s'est ajouté la colère, l'incertitude et un sentiment sur lequel je ne pouvais encore mettre de nom.
Il m'assure que la vie "réelle" a beaucoup plus d'intérêt que la vie "virtuelle". Il a hâte que je découvre à quel point la première est bien plus agréable, qu'elle vaut le coup d'être vécue juste pour essayer au moins une fois le sexe.
Le sexe, nous y voilà. Cette chose qui semble prendre la tête de tout le monde, de ronger leurs esprits mal nourris. Toutes ces conneries d'humains,elfes et autres, je peux aisément m'en passer.
Je n'en peux plus, je ne suis pas faite pour la sociabilisation. Je rentre chez moi et je reste loin de tout contact pendant quelques jours. Je ressens des émotions et c'est certainement la pire des chose qu'il pouvait m'arriver. La prochaine fois, j'irai trouver une bande d'androïdes dépourvus de sentiment, si ça existe ici évidemment.

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Premiers pas
17 Février 2015
721√  5☆ 1◊

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