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Cacher

quod me nutrit

Il est tard, cela fait longtemps que la nuit est tombée. Installée dans la cuisine du Centre d'Accueil Impérial, où elle travaille désormais, Varta contemple sa déchéance.
De loin, elle paraît un peu frêle, rien de plus. Mais quand on y regarde de plus près, on s'aperçoit très vite que quelque chose ne va pas. Ses joues sont creusées, son teint est pâle, cireux. Des cernes entourent ses yeux, soulignant un regard angoissé, stressé. Vêtue d'un pull trop ample qui dissimule mal sa maigreur, Varta n'est plus que l'ombre de la jeune femme belle et pétillante qu'elle a pu être. Ses manches lorsqu'elles retombent dévoilent des poignets fins, sur laquelle la peau paraît presque transparente. Ses os au niveau des clavicules sont saillants, ses fesses plates, ses cheveux autrefois rougeoyants sont ternes.
Perchée sur un haut tabouret, les jambes repliées sous elle, Varta fixe du regard les gâteaux qu'elle a soigneusement alignés sur le bar. Pour elle, sa déchéance c'est ça. Ce qu'elle s'apprête à faire. Elle ferme un peu les yeux, luttant contre la pulsion qu'elle sait pourtant inéluctable. Tôt ou tard, elle finira par craquer, le tout est de savoir quand exactement.
Depuis longtemps, trop longtemps déjà elle a restreint son alimentation, restant parfois des jours sans avaler une miette. Au début, elle s'était sentie puissante. Oui, elle était forte. Oui, elle trouvait en elle la force de résister à cette pulsion primaire, ce besoin viscéral et tellement répugnant. Elle était différente, elle contrôlait son corps parfaitement. Les exercices physiques et les entraînements auxquels elle continuait de se soumettre régulièrement entretenaient ses muscles et les empêchaient de fondre, lui donnant une silhouette sèche mais athlétique qui lui plaisait.
Mais, ensuite, la maladie avait encore pris de l'ampleur, et les jeûnes répétés l'avaient affaiblis au point qu'elle fut obligé de cacher son corps aux yeux des autres. Le miroir lui renvoyait une image déformée, celle d'une jeune femme aux formes généreuses, alors qu'elle n'était désormais guère plus qu'un cadavre. Pourtant elle se trouvait encore trop grosses, cherchant de la graisse là où il n'y en avait plus depuis longtemps. Ses côtes sont visibles jusque dans le dos, son ventre est un creux, on voit les os de son bassin et de ses genoux. Le petit pull ample qui ne le quittait plus avait trouvé là toute son utilité : cacher cette misère.
Varta inspire doucement pour tenter de se calmer, rouvrant les yeux. La crise est là, toute proche, sur le point de la submerger. Elle ne peut plus lutter, cela va arriver. Une barrière cède et la crise commence.
Elle prend tous les gâteaux un par un et les engloutit à toute vitesse, sans réfléchir. Biscuits secs, cookies, gâteau à la crème. Sur la table il y a tout un festin de sucreries qu'elle dévore presque sans réfléchir, à la hâte. Elle ne s'arrête qu'une fois la dernière miette avalée.
Maitenant, elle sait ce qui lui reste à faire.
Elle ne peut pas garder toute cette nourriture en elle, c'est impossible. La rousse prend une bouteille d'eau qu'elle a préparée à l'avance et la boit à longs traits. L'eau est tiède, presque chaude. Ecoeurante. Pourtant il le faut sinon... Varta vacille un peu en se levant, nauséeuse. Elle n'a presque plus besoin de forcer à présent. C'est comme si la nourriture savait qu'elle ne ferait qu'un passage express dans son estomac, que la voie empruntée à l'aller serait celle utilisée aussi au retour.
Toilettes du centre. Varta est penchée au-dessus de la cuvette, les doigts enfoncés au fond de sa gorge. La crise est terminée, avec comme toujours son lot de souffrances et de larmes. Elle se redresse fébrilement, puis entreprend de nettoyer les traces de ses égarements.
Personne ne doit jamais savoir, personne. Certains ont remarqué sa maigreur, mais jusque là le secret concernant ses crises a été bien gardé. Ils la jugeraient, ne comprendraient pas. Personne n'a vu que ses mains sont abîmées, rongées par l'acidité. Et quand on l'interroge sur son aspect elle donne le change, esquive le sujet.
Non elle n'est pas malade, juste fatiguée. Et toi, ça va bien ?
Varta termine de ranger la cuisine juste à temps. Un Ni vient d'entrer au centre d'acceuil impérial, et elle le prend en charge. La vie reprend son cours, presque normalement.
Dans un coin, le voyant rouge d'une caméra clignote doucement. Elle avait juste oublié un petit détail....

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Années 2, 3 et plus...
08 Septembre 2013
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