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Première mission - 1/3

Si on marche assez longtemps vers l’est, on arrive jusqu’à un petit ensemble de rues que les gens surnomment indistinctement la Friche ou le Quartier.
L’endroit est résidentiel, on y trouve des bâtiments vétustes, pour ne pas dire des taudis, et la plupart des technologies employées comptent parmi les premières installées lors du développement de la cité. Cela traduit à la fois l’ancienneté de ce quartier et le désintérêt du public comme de l’administration quant à sa modernisation.
Les quelques boutiques qui y survivent sont des bouis-bouis bon marché avec des plats rapides que l’on peut manger sur des bancs de fortune couverts de toiles temporaires. Cela empeste la grillade et la graisse rance à toute heure de la journée.
Les habitués savent leur chemin jusqu’au réseau d’enseignes informelles, souvent situées dans des appartements, des baux totalement officieux permettant aux aficionados des implants, et plus généralement aux amateurs d’électroniques, de trouver des modèles uniques de kitbashing non autorisés par les IAs.
Rien de ce qu’on peut acheter ici n’est légal, mais rien n’y est profondément illégal non plus. Bien sûr, çà et là, s’échangent sous le manteau des armes de surplus militaires dont les codes d’identification auront été effacés, mais ne cherchez pas la perle rare. On se débrouille, on vit au jour le jour et on a oublié depuis longtemps les grands rêves de richesses.
L'endroit est à 40% habité par des kobolds. Il est globalement communautaire, au point que certains idiomes sont nés et ne sont compris que par les gens du coin ou le fréquentant à minima.
Les rues étroites sont parcourues de néons aux couleurs incandescentes qui transpercent le smog. Les publicités sont agressives, à la fois lumineuses et bruyantes. L’inspection d’hygiène urbaine a rendu un rapport accablant sur ce sujet, qui est renouvelé en l’état chaque fois qu’un audit vise le quartier, mais les mises en demeure de procéder à des aménagements moins envahissants sont ignorées par les propriétaires. Les loyers peinent à permettre des profits, alors tous les moyens sont bons pour trouver des sources de revenus et vendre de l’espace publicitaire s’est imposé comme une coutume.
Le Rooftop’s Denise est l’un des plus anciens bars à thème du secteur, quoique peu réputé. Situé au sommet de l’immeuble Koyama, on peut y commander sa spécialité : le bubble boat, un thé noir remonté d’une crème de skiwi sur lequel flottent des billes de mûres.
Il y fait sombre et seules quelques plantes synthétiques luminescentes font office de lampes. Le grand atout de l’endroit ce sont ses haut-parleurs qui usent de fréquences non audibles pour entraver la plupart des sonorités basses et aiguës délivrées par la foultitude de drones et autres panneaux-aimants qui parsèment les rues en contrebas.
Ce calme est prisé par Shade. Habillée d’un tailleur blanc, elle fume une longue et fine cigarette devant son bubble loin du brouhaha. Son regard initialement rivé sur son deck se lève pour suivre la trajectoire d’un drone qui traverse l’espace aérien dans un vrombissement plus tactile que bruyant avant de disparaître.
La jeune kobolde revient à son écran. L’article de journal n’est pas anodin, pourtant il n’est pas mis en avant. Une simple annonce. La zone F8 rentre désormais dans les critères de réévaluation du tissu urbain et la Friche est directement impactée. Chaque rue va se voir attribuer un budget afin de réformer entièrement le plan d’urbanisme au niveau local. Des implantations importantes de bâtiments flambant neufs vont permettre de moderniser le quartier. L’objectif avoué selon Janet P. la journaliste : la sédentarisation des nouveaux actifs, et la fixation d’un pôle de formation aux métiers de demain.
Elle sourit légèrement en coin. À l’insu de la jeune femme, une forme de fierté la bouscule. Ils choisissent la Friche pour tous ses pseudos ingénieurs, ses petits cracks de l’informatique.
- Tu as fini l’article ?
La Voix surgit dans son système audio intraauriculaire. Shade n’est pas spécialement ébranlée, mais son sourire s’efface.
- J’ai fini, dit-elle doucement, consciente qu’en raison de la nature de l’espace sonore quoiqu’elle dise, sous une certaine fréquence, ses mots ne seront pas perçus.
La Voix reprend :
- Des sommes vraiment importantes sont en jeu dans cette histoire de rénovation. Des sommes qui intéressent le Cartel. Tu comprends ce que je veux dire ?
- Vous vous positionnez sur des marchés publics ? répond-elle avec innocence.
- Ne fais pas l’idiote. Il y a des intérêts bien supérieurs à ceux de la Friche. Et tu vas participer à les préserver.
- Vous me surestimez, monsieur, je n’ai pas ce pouvoir d’influence.
- Letton Williams est un jeune agent administratif. Il est aussi militant associatif et tient en main la possibilité de choisir le partenaire en charge du projet immobilier principal, les dossiers s’entassent sur son bureau. Je veux que lui et son comité sélectionnent la compagnie New Line Synthetic.
- Et comment je les y force ?
- C’est ton métier, tu te débrouilles.
Shade s’enfonce dans son fauteuil avant de boire une longue gorgée de Bubble boat.
Sur son silmerion défile le visage et les données récentes concernant Letton. Il est jeune, dynamique. Plein de rêves. Ils ont des choses en commun.
Elle considère les lumières en contrebas. Elle aime la Friche, et souhaite la voir fleurir. Si New Line Synthetic prend le marché, la quasi-totalité des budgets alloués au renouvellement du tissu urbain iront à des intérêts privés et s'évanouiront dans des lignes bancaires introuvables. Elle connaît les schémas. Ils vont tout engloutir avant de disparaître. Et le quartier ne bougera pas.
- Shade ?
La Voix l’interroge. Elle répond avec autant de neutralité que possible.
- Je vais avoir besoin de matériel. Et d’une compensation à la hauteur, monsieur.
- Envoie ta liste. Je jugerai de la récompense en fonction du résultat.
Un jeune serveur se présente devant Shade avec la carte des pâtisseries. D’un signe de main, elle refuse avec douceur avant de le regarder partir.
Elle n’a plus d’appétit ni l’envie de sourire.

Informations sur l'article

textes
11 Juillet 2023
354√  19 3

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◊ Commentaires

  • Haven (62☆) Le 12 Juillet 2023
    Ecris encore !
  • Law (103☆) Le 13 Août 2023
    Stylé (j'aime beaucoup le style et le lore généré)
  • Liouli (371☆) Le 20 Août 2023
    Sympa, tu donnes du corps au quartier.