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EDC de 45594

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1. L'Écureuil arrive à Dreadcast

L'outrilien s'agite sur son dossier, plisse ses yeux fatigués sur les divers écrans qui lui font face, tout en balançant sa queue écailleuse de droite à gauche lentement, le bout de celle-ci venant racler le sol glacial, en harmonie avec la sonorité naturelle, pure, qui règne dans le lieu. Il claque sa langue fourchue entre ses dents acérés, des cernes sous les yeux, satisfait de son travail semble-t-il, sa journée de labeur étant sur le point de s'achever pour lui.
  • C'est bon ! Celui-là est prêt Xana, dit-il. Le technicien en blouse blanche, taché jusqu'à la fin des temps du fait de ce liquide verdâtre qu'il côtoie tout les jours, reporte son attention sur la cuve qui se trouve à portée de main, une silhouette inerte se dessinant à l'intérieur.
  • Bien professeur, j'entame la procédure d'éveil et déverrouille le système de sécurité, répond l'intelligence artificielle d'une voix féminine monotone et sans vie.
Le reptile attarde son regard sur les centaines de cuves verdâtres où autant de corps germent lentement, côte à côte depuis des millénaires dans l'attente d'un réveil prochain ou d'un ADN adéquat, autant de travail aux yeux du technicien. Il détourne son attention pour suivre la barre d'évolution de la procédure sur son écran numérique pianotant à nouveau pour son journal de bord, alors que dans un même temps, les miracles de la technologie s'affairent sur le corps endormi, aux muscles atrophiés, flottant dans un liquide en ébullition. Les bulles d'air se font plus nombreuses tandis que le niveau du liquide s'abaisse peu à peu, les câbles reliant le puissant ordinateur au cerveau de l'être humain finissent de transférer les dernières données basiques envoyés par l'intelligence artificielle. L'œuvre de l'outrilien et de son ordinateur qui ont fait évoluer cet être, comme des milliers d'autres avant lui du stade de fœtus à celui d'individu d'âge mur, s'agite. L'humain commence à tourner soudainement la tête en tous sens périodiquement, les câbles se détachent tout aussi rapidement et se rétracte, laissant le corps baigner encore quelques instants dans ce qu'il a toujours connu.
  • Processus d'éveil en phase terminale. Ouverture de l'espace de confinement de la cuve de maturation, reprend l'ordinateur. Le technicien se lève et regarde non sans émotions, l'éveil de sa nouvelle création.
Le corps nu, pâle, entouré de cette forme visqueuses, s'écroule sur le par terre dans un soupir de faiblesse, une légère vague du liquide de maturation s'échappant de la cuve sur le sol gelé avec lui. Il reste au sol, replié sur lui-même tremblotant, de la vapeur s'échappant des pores de sa peau. Le technicien finit d'écrire des informations sur son bloc-notes rapidement avant de rester pensif en fixant l'humain sous ses yeux et tapote la cuve avec son stylo un moment.
  • Joaw, s'exclame-t-il, puis remplit la case "nom".
L'éveil est brutal, aveuglant, un bruit reste en sourdine et me bourdonne dans les tympans. Je perçois encore mal ce qu'il y a autour de moi tandis que j'essaie de me redresser en prenant appuis sur mes bras faibles. Je fronce les sourcils pris de nausée tout en ressentant du bout des doigts ce liquide visqueux collant encore ma peau, après une vive poussée d'adrénaline je dégage cette chose mouillée avec des vrilles glacées rapidement sur le bas-côté, les yeux mi-clos, mes paupières ayant encore du mal à répondre. J'entrouvre un peu plus les yeux encore, la rétine me brûle mais j'ai le temps d'apercevoir des narines surmontées d'écailles non loin de mon visage.
  • Salut, l'outrilien vient me renifler comme pour juger de mon état alors que la pluie semble accroître son débit sur les vitres du Centre d'Arrivée.
Le bruit incessant d'une turbine et l'haleine fétide du lézard me donne encore la migraine, je maintiens ma tête d'une main, la frottant sur mon crâne rasé. J'aperçois soudainement un grand flou lumineux et grimace mettant mes mains en avant et détournant le regard, le reptile reprend rangeant sa lampe torche : Réaction oculaire normale mais l'acuité visuelle est faible. Celui-là aura besoin d'une bonne paire de binocles ! L'ordinateur semble prendre en compte ses informations, une série de bips se fait entendre. Je sens que l'outrilien vient me piquer en un clin d'oeil sur mon avant-bras, une nouvelle série de bips se fait entendre. Il se retourne fouillant dans des bacs.
  • On y voit comme dans le cul d'un écureuil à son réveil. Et j'te parle pas de tes muscles, c'est de la compote pendant quelques jours, le technicien semble se remémorer son propre éveil avant de venir poser un sac à côté de moi, tout en s'adressant à son ordinateur : Prend note Xana, l'individu est apte à survivre. Le clone est sain d'esprit et ses chances de croissance intellectuelles et martiales sont normales. Bilan positif aux examens médicaux, pas de pathologies ou de maladies transmissibles graves connues.
Je me maintiens le bassin d'une main, mon estomac devenu rigide semble se contracter et tremblotant toujours involontairement, je ne peux m'empêcher de me plier en deux et vomir à plusieurs reprises. Après m'être endormi quelques instants épuisés par ce long processus qui m'avait maintenu en vie depuis, je retrouve mes esprits peu à peu. Je fouille aussitôt dans la sacoche et y trouver de quoi m'habiller au milieu de la ration alimentaire, d'une crédit puce, d'une carte de secteur. Le bâtiment a été déserté, seules quelques lumières tout aussi pâle que ma peau restent en suspension dans cette obscurité inquiétante mais après avoir eu quelques difficultés pour me vêtir et me redresser sur mes guiboles en pyjama d'hôpital bien trop large pour mon anatomie, j'essaie de m'éloigner et quitter ce laboratoire. Soucieux et incompréhensif, je me traine jusqu'au fond d'une salle poussiéreuse et mal odorante où des cuves au liquide vert émeraude tamponné du même sigle, laisse parfois entrevoir une silhouette sans vie.
La peur, le mal de crâne, la faiblesse du corps, l'envie de vomir et dans l'incompréhension la plus totale, je heurte précipitamment une porte en métal. C'est à peine si mes sens sont en éveil lorsque je pousse cette sortie miracle qui s'ouvre dans un rugissement d'acier laissant place à un environnement pollué et radioactif. Une eau acide vient tambouriner ma peau et gorger mes vêtements, je cligne des yeux tout en la regardant, elle, DreadCast.
J'entends la porte couiné se refermant seule. Cette ville me semble soudain être ce que j'attendais depuis toujours, ma seule raison de subsister, venant répondre à toutes mes interrogations sous mes yeux ébahis et je me condamne a y demeurer toutes mes existences. La musique se met enfin en route, ma tête bourdonne toujours, et tout en frissonnant sous cette pluie qui me pique la peau, je sors précipitamment ma fiche du nouvel arrivé pour en lire les indications. A la suite de quoi, je pointe sur ma carte de secteur, le chemin pour atteindre le Centre d'Information Pour l'Emploi et m'y dirige.
Je marche d'un pas rapide, le plus rapide possible après un éveil, dans l'avenue trempée abondamment sans attarder mes yeux dans les ruelles de la ville, sur chaque détail, panneaux publicitaires des corporations ou de propagandes de la Rébellion. L'eau acide dégouline sur mes cils et me pique cette fois-ci les yeux, je m'arrête un instant me frottant ces derniers. La mégalopole aux allures jungle urbaine en ébullition constante se dévoile peu à peu à chaque nouveau pas sous l'épaisseur de sa pollution prolongeant la cité dans la nuit permanente, DreadCast est en réalité un tas d'humus en décomposition où ses habitants sont les vers qui s'en nourrissent et d'où on ne s'échappe pas.
Lentement, je me schématise la cité dans la tête avec ses villas de rêves et ses taudis aux tôles ondulés emmagasinant l'eau de pluie, ses pubs miteux et les hauts fourneaux des usines et de la Centrale. C'est là, au milieu de terrains vagues, boueux et marécageux, que se trouve le sanctuaire des chercheurs d'emplois. J'entre dans le bâtiment, toujours avec la trouille au ventre ne sachant pas vraiment ce que je dois faire, la tête dans les épaules celle-ci arrêtant enfin de bourdonner même si mes envies de vomir persistent. Je réajuste mes maigres vêtements qui, avec la pluie acide, se sont décomposés et ont l’apparence à présent de haillons. Je me fraye un passage dans la faune qui traine encore assoupi dans les couloirs : vautours, trolls, nains, gobelins, kobolds autant de races que de poils sur un gnoll, toute cette mosaïque à dormir dans le hall correspondait tout à fait à cette ville. Les murs du Centre projette des hologrammes qui diffusent en boucle les mêmes messages de ceux venus les y installer, proposant la meilleure offre d'emploi de tout le secteur, avec un bon salaire à la clé, difficile de se faire un choix tant les annonces sont si diverses et variées.
Je me conseille à moi-même de prendre le parcours habituel pour un nouvel arrivant, c'est-à-dire, un emploi en tant que simple technicien d'entretien à la Centrale Énergétique de la Ville. Moi, le maigrichon, comme on se plaira à me surnommer plus tard du fait de ma faible musculature et de mon charisme équivalant à de la purée d'écureuil, prend ma destinée en main. Je longe les murs pour atteindre une borne qui traitera automatiquement ma demande en suivant les indications à l'écran puis je clique pour confirmer ma demande d'emploi quand soudainement un haut-parleur tout aussi crasseux que la ville elle-même à l'angle d’une colonne récupère mon attention :
  • Krsh. Arrête de trainer et va bosser ! Que ta future carcasse nous serve à quelques choses avant qu'elle ne tombe à nouveau dans une cuve ! Et profite bien des joies de la vie éternelle ! P'tin, les nouveaux sont tous ... Krshhh. Krsh.
A ces mots, je m’empresse de rejoindre paniqué la Centrale attifement me guidant à l'aide de la lointaine sonorité du roulement des machines et des cuves énergétiques recrachant dans le ciel voilé ces gaz radioactifs, ceux s’échappant des cristaux farins. La pluie s'intensifie un peu plus et achève de mettre mes bouts de tissus en lambeaux. Je découvre ébahi les entrailles de ce monstre d'acier qui alimente toute la ville en franchissant l'épaisse porte de sécurité blindée capable de contenir une implosion ou une attaque externe. L’air était vicié, bien plus encore que dans le reste de la ville, à tel point que malgré mon besoin d’oxygène, je ne réussissais qu’à prendre de courtes respirations avant de suffoquer dans ce lieu grouillant de multiples activités entre ses techniciens et ses récolteurs.
Je rejoins mon poste de travail et tarde pas à vite comprendre pourquoi le poste est sans candidature après mes premières heures de travail dans cette pompe énergétique, qui, sans le sacrifice de ses techniciens, n'alimenterait plus la ville en énergie et marquerait la fin de tout espoir pour notre secteur. Cette première journée se termine épuisante et forte en émotion, je m'endors à mon poste l'estomac vide au milieu du ronflement des machines après avoir discuté avec les anciens robots impériaux toujours en activités, programmés pour épauler un personnel impérial, qui datent encore des premiers âges de la Rébellion. L’un d’entre eux me demande même ce qu’un humain peut bien faire ici, dans cet endroit où la race « supérieure » n’a rien à faire là. C’est à cette remarque que j’ai bel et bien compris que j’étais né du bon côté du mur.
Le lendemain, je me réveille au milieu du même fourmillement incessant, je reprends le travail en tenue de sapeur autour d'un nombre étonnant de nains et de gobelins, je surveille et j'entretiens les cuves à cristaux farins, principale source d'énergie que les collecteurs nous rapportent de leurs fouilles dans le sol de DreadCast. Nous ne sommes rien de plus que des appendices de chair dans des rouages de fer.
La directrice de la Centrale Énergétique de l’époque : Lady Sarsaparilla, devient l'une des seules personnes à qui je m'adresse depuis mon arrivée, elle m'accueille et me guide à travers ma nouvelle fonction, mal payée lorsque l’on en reste au stade d’apprenti. Je bouquine les livres qu’elle nous met à dispositions à la salle de repos de la Centrale, j'en apprends sur la ville et sa division inter sectorielle, sur notre Rébellion, sur notre lutte contre la dictature et l’oppression. Notre lutte pour la Liberté et la Vérité.
Mon problème de vue devenait très handicapant lors de mes lectures ainsi qu'au travail et j'ai dû songé, pour y pallier, à me bricoler ma première paire de lunettes, autrement dit un bon rafistolage digne d'un travail de gobelin en pleine opération chirurgicale. Du scotch maintenait des fonds de bouteilles contenant elles-mêmes de fines plaques de cristaux farins en forme de parabole afin de corriger mon acuité visuelle. Avec ses binocles, bien que peu esthétiques, j'ai pu apprécier la lecture de livres et mes premières lignes de code sur la matrice.
Mon deuxième et troisième jour défilent en un battement de cil sans que je me sociabilise plus que ça, répondant à quelques messages sur mon communicateur de bienvenue. Décidé, je prends mon courage à deux mains et je file dans la cité que je n'avais pas encore revu depuis mon éveil. Il faut dire aussi que la faim et la soif ont eu raison de ma peur de la populace et je trouve enfin un bar-restaurant ouvert après quelques minutes de recherche sous une pluie toujours aussi abondante. Le Cercle d'Argent m'ouvre ses portes et je reste silencieux pour rejoindre le comptoir discrètement apercevant des habitués qui ne semble pas remarquer ma présence. Je reprends mon souffle et prend commande au distributeur dans mon coin d'un sandwich et d'un glukoz, goûtant pour la première fois de l'écureuil.
C'est aussi mes premiers visages après celui de ma patronne à la Centrale et lorsque je m'apprêtais à partir après avoir écouté les conversations et terminé mon livre, je prend confiance et remercie la serveuse d'un simple "Merci." avec un peu sourire amical tout aussi naïf qu'insouciant.
  • Ah ! Elle parle la biscotte ! S'exclame une des clientes répondant au nom d'Eva. Je panique aussitôt ne voulant pas être le nouveau festin d'écureuil du jour, j'essaie de me reprendre :
  • Heu... Bonjour... Je me m'appelle Joaw. Heu... Je suis enchanté de faire votre connaissance. Et je ne tarde pas à avoir une réponse :
  • Pfff ! C'est tellement faux cul ! Je rougis et panique à nouveau en plus d'être vexé, tandis qu'elle, rit vulgairement et reprend sa bouteille d'alcool au goulot buvant une nouvelle gorgée. Ce même alcool qui me fait tordre l'estomac en tout sens, le fameux et populaire : Skiwi.
Le franc parler et le décomplexe des clients m'étonne et m'effraye, moi qui alors ne m'adressait à personne. Après une série de surnoms, on me questionne et je leur apprends sans doute sans aucune surprise que je suis né la veille. Alors que je réajuste mes haillons tout en continuant mon histoire, une elfette, du nom d’Inori m’offre mes premiers vrais vêtements : une belle chemise rapiécé et des chaussures de villes rembourrés. L'Écureuil prend une nouvelle allure même si l’odeur de la sueur et du liquide du maturation reste, la douche manque terriblement.
Ce chapitre de ma vie se clôture à la Centrale, par ma rencontre avec la première gnoll que j'ai vu en ville : Ynaelle. Autant dire que j'avais vraiment la trouille même si j'ai l'impression d'avoir ce sentiment là par nature, il faut tout de même avoué qu'un gnoll est un être impressionnant. Mais Ynaelle se distinguait par sa gentillesse envers les nouveaux arrivants comme moi, elle m'a expliqué ses origines vautourde puis son passage à son état actuel. Quant-à-moi, je souriais l'air béat et enregistrais émerveillé ses paroles même après avoir paniqué au début, elle s'en amusait. Quelques jours avant son départ, elle venait me proposer une nouvelle besace pleine d'outils adéquats pour un travailleur de la Centrale mais aussi pour tout bon Rebelle : un Terminal Portable, un Neuvopack et un deck retro.
Mon deck m'offrait enfin la possibilité d'accéder à la matrice et donc aux espaces matriciels des associations et politacles du secteur. C'est ainsi, que je débute mes écris sur quelques morceaux de papiers réajustant mes grosses lunettes noires rafistolés sur le bout de mon nez, un sourire sur le visage tout en mettant noir sur blanc des idées et des schémas m'intéressant à l'histoire, à l'économie et à la politique du secteur.
"Ce que j'ignorai, c'était quel genre d'homme j'allais devenir, qui je serais aux yeux de mes camarades et de la Rébellion... Je le découvrirai bien assez tôt."

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Biographie
05 Novembre 2013
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