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EDC de Maellynn~1382

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Fragments : Entre deux morts

• 1/234.1 – Mise en cuve de régénération physio-psychologique de l’individu 1382.
Le calme. La paix. Le silence.
Le temps est à la récupération, au repos.
Trop de temps. Trop de zèle. Pas assez de mots. Un comble.
Il était venu le temps du repos, les soucis neurologiques se faisant trop sentir. Ou pas assez.. Elle vivait cette étrange sensation de ne pas en avoir. Ces dysfonctionnements la perturbaient, alors elle s’était plongée dans la tâche. Puis elle fut de nouveau mutilée. Réparée a blanc. Sans un mot, sans un sursaut. L’aiguille raccommodait son visage sans qu’elle n’en sente la morsure.
Il lui fallait alors masquer une douleur qui n’était pas physique. Elle ne sent plus. Ou elle sent trop, au fil des effets aléatoires qu’induisent les neuroleptiques qu’elle impose à son organisme pour le maintenir alerte. Pour maintenir l’illusion d’un monument inébranlable qui avance encore et toujours. Inlassablement.. Vers quelque chose qu’elle-même ne saisissait pas mais qu’elle savait suffisamment grandiose pour qu’elle s’y consume corps et âme.
Elle sombra dans l’inconscience, s’abandonnant aux multiples trodes dans le liquide emplissant la cuve.
« Ô Cyrius, donne-moi la force. »
• 3/234.1 – Interruption non programmée du protocole de régénération
Perte du signal de l’individu 1382.


Quelqu’un avait réussi à s’introduire dans le laboratoire privé. Il avait du trouver l’entrée secrète, passer les sécurités et, par on ne sait quel miracle –ou malheur- avait retrouvé le corps en stase de Maellynn dans le dédale de la multitude de couloirs et de salles d’expériences du bâtiment. Cela semblait tout bonnement impossible, défiant la logique.
La cuve fut ouverte prématurément, de manière violente.
La fébrile vie qu’elle renfermait fut arrachée sans ménagement aux infimes câbles qui la maintenaient.

« Interruption non programmée du protocole de maintien neurologique. 
Régénération non terminée. Erreur. »

L’automatisme du système de téléportation APM vint arracher plus brutalement encore ce corps mutilé provoquant une interruption fatale du protocole. Les écrans de contrôle s’alarmaient, impuissants. La mort cérébrale comme conséquence d’un anodin meurtre physique perpétré au hasard et sans raison. Le corps fut transféré au centre de clonage, mais la marche habituelle de clonage fut impossible.
« Tentative de récupération. Echec. 
Patrimoine incomplet ou erroné. »
« Lancement du programme de reconstitution neurologique artificielle.
Recyclage de l’ID 1382 pour cause d’invalidité
si irrécupérable via reconstitution artificielle. »

Elle n’avait pas eu le temps de remettre a jour ses informations déformées par ses dernières péripéties matricielles. Sa cuve de régénération n’avait pas été mené a terme. Il y avait alors cet infime grain de sable empêchant les puissants rouages sans failles du clonage de faire leur travail.
Elle était à nouveau coincée dans le néant.

• Année 234. A un instant T quelque part entre partout et ailleurs.
Fantasme ou cauchemar. Un claquement puis le vide. Elle voit tout et puis plus rien. Résidus épars d’un esprit plus délabré encore que son corps mutilé. Il porte les stigmates des siècles vécus. De la souffrance qu’inflige la cité du smog aux âmes suffisamment aliénées pour tenter de se dresser contre elle. Elle est petite et recroquevillée, rachitique. Aveugle et affaiblie. Le corps sans vie flotte dans une nouvelle cuve, cette fois-ci au centre de clonage. Pâle reflet peu engagent de la femme qui l’a animé ces 110 dernières années.
- Regarde ce que tu es devenu Zwei. 

Le silence rompu du néant. Oppressant. Elle titube dans le vide, sans équilibre et sans repères.
- Ô Cyrius.. je ne distingue pas ta lumière. Ou es-tu ?
Un rire dédaigneux. Une douleur aiguë. Mentale.

- Crois-tu vraiment que ton cyrius va te parler ? 
Ici dans ton esprit malade ? Tu es morte Zwei.

La déception menait un combat sans merci avec l’incompréhension.
- Qui es-tu ? ..Voodoo ?

- Un peu de lui. Un peu d’elle. 
Je ne suis qu’un éclat de toi.
De tes souvenirs. Personne d’autre.

Elle ne comprenait pas d’avantage cette réponse que ce qui pouvait bien l’amener a parler avec elle-même. Elle se renfermait un peu plus sur ce qu’il restait d’elle dans une plainte douloureuse.

- Te souviens-tu seulement encore d’où tu viens 
Lady Maellynn Tarvitz, Legatus de Sa Sainte parole Impériale ?

Un silence long. Honteux. Une réponse a peine soufflée dans l’obscurité.
- De la rue..
De nouveau ce rire dédaigneux et terriblement humiliant.

- Comme tous. Sans famille et seule. 
Un déchet parmi les autres.

- Nous sommes tous Ses fils..

- Tu ignorais jusqu’à Son nom à ton éveil. 
Hypocrite. Ce n’est pas lui qui t’as donné les clés pour t’en sortir.

Elle ne répondit pas, se morfondant à ces mots.

- Tu as renié la première et seule main qui t’as été tendu. 
Tu as ensuite renié les tiens.
Te souviens-tu seulement de ceux qui t’entouraient ?

- Constantine.. Ce nom n’existe plus. Il n’est plus le mien. Sthan n’est plus. Tout annihilé d’un revers de météorite.. dans les flammes.. le sang.. la haine..
Des larmes aussi fictives que brulantes vinrent tenailler ce qu’il restait d’elle. Colère, désespoir. La voix qui lui parlait changea pour prendre le timbre que ses lointains souvenirs attribuaient au défunt qu’elle avait considéré comme un frère un siècle plus tôt.

- Flash. Psyko. Kronatium. 
Me résumes-tu donc seulement à ça maintenant ?

- Non.. non. Reviens. Reviens moi.. Tu m’as abandonné.

- Je suis mort mael. Tu le sais. 
Comme tu sais qu’aujourd’hui toi aussi.

Elle ne comprenait pas pourquoi cette voix la torturait ainsi. Elle souffrait d’une douleur dont elle n’aurait su définir ni la nature ni la provenance.
- C’est que j’ai fais mon temps..

- La fin est toujours brutale. Jamais au bon moment. 
Aujourd’hui c’est toi qui les a abandonné. Tes petits plumés.
Ceux qui se sont sacrifiés pour te préserver. Quel beau présent tu leur fais.
C’est ainsi que tu les remercie ?
En piétinant leur confiance et leurs efforts ?

- Je..

- Full. Tu l’a abandonné lui aussi. 
Au moment ou il avait le plus besoin de toi.
Tu n’as jamais eu plus de courage que moi.
Maintenir l’illusion pour montrer l’exemple, n’est-ce pas ?
Ô mael, tu es sans doute la plus irréprochable de tout l’imperium.
Vertueuse. Incorruptible. Investie. Convaincue même.
Un siècle de bonne conduite.
Et qu’est-ce que cela t’apporte ?
Tu sèmes la douleur et la déception aux rares personnes assez stupides
pour oser faire partie de ton entourage.

- Laisse-moi en paix..

- Tu es égoïste. 
Tu te négliges et ne penses pas à toi, c’est vrai.
Mais tu ne penses pas aux tiens non plus.
Tu ne penses à personne sinon a cette entité divine que tu vénères.
T’as t'elle rendu un centième de ce que tu lui offres ?
Ton cyrius t’as t’il relevé lorsque tu tombais ?

Elle se crispait, éprise d’une indignation haineuse a l’égard de cette entité disparue qui la malmenait.
- Il m’a donné.. la foi !

- Ça te fait de beaux yeux. Artificiels. 
Ils semblent dysfonctionner. Tu n’y vois rien.

- La foi en l’humanité. La foi en l’avenir. La foi en cette cause pour laquelle nous nous battons chaque jour.

- On dirait bien que tu commences a retrouver la vue finalement… 
pauvre petite mael perdue.

- Cesse de me torturer ainsi.

- Alors bats-toi ! 
Lève-toi et bats toi pour ce qui t’es le plus cher
et que tu n’es pas même capable de voir.
Pour toi, pour les tiens et pour tous les autres.

- Je.. je ne comprends pas. Qu’est-ce.. ?

- BATS TOI POUR LA VIE ! 

• 6.234/2 – Fin du programme de reconstitution neurologique artificielle.
Dix jours de vide.
Dix jours de mort de plus, passé dans un caisson de clonage.
Des scientifiques et ingénieurs accrédités s’étaient affairés durant ces dix jours sur ce caisson étrange, ce cas jamais vu dans la machine immortalité. Il s’agissait d’une nobilis, legatus sortante. Personne ne voulait prendre la responsabilité d’avoir a recycler son ID. Cela aurait pu être jugé comme une faute professionnelle, une négligence ou bien pire encore, un crime.
Plus les cycles passaient et moins ils y croyaient. La tension montait au même titre que la crainte des représailles.
Mais au prix de leurs efforts conjugués et d’une certaine dose de chance, il parvinrent au bout de leur entreprise et le corps meurtri de l’ID 1382 reprit vie.

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Récits divers
14 Août 2013
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