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I. Incipit (Non référencé)

(☺)Mettre des mots sur autrui, les choses ; élever tout ce que l'on voit d'une plume blanche, vaguement gracile ; créer des émotions comme les notes en évoquent, inventer des couleurs, tant pis si ça n'a aucun sens, tant pis si c'est irréel et si c'est mauvais. J'ai voulu décrire, d'abord, décrire le monde pour m'y ancrer, pour m'écrier et déclamer que j'avais produit quelque chose, et m'entourer de la satisfaction chaude, celle de l’accomplissement, d'avoir donné naissance. Faute d'un enfant, faute d'aimer les gens, je m'essaye aux lettres, comme si soudain une passion s'éveillait, même si ce n'est qu'une lubie d'un jour, sans doute, et le temps que le smog s’épaississe dans l'air vespéral, j'aurais caché tout ça loin, ailleurs dans le fond de mon crâne et de ma mémoire. Les meubles, la musique, l'appartement, celui-là qui est si vide, son néant qui me désolât, sont sans doute un bon point de départ. Alors je déploie mon lexique, les tournures étranges, et tant pis pour les mots mâchés comme du papier qui m'emplissaient la bouche, tant pis pour mes grands airs de fille vulgaire, ou froide, comme du marbre, de la pierre, celle du pavé. Qu'à cela ne tienne, toutes ces choses, un pas vers le narcissisme pour faire reculer l'ennui, la tristesse, la mort, conjurer le sort, si j'y crois, c'est réel, tout est réel.

...Parfois les choses me dépassent ; parfois trop de messages m'assaillent, je m'éveille et je n'ai pas agi, et souvent les remords me frappent comme un marteau, quelque chose de lourd, au creux de mon estomac. Je me suis réfugiée sur le canapé, celui qui accueillit notre quartet de jadis, je respire doucement ; ce n'est jamais simple. Je vais travailler, un peu, alors, montrer mon visage, mes sarcasmes, évoquer le souvenir, celui que je suis toujours en vie malgré tout. C'est elle qui m'a donné envie d'écrire soudain, elle et la musique, un son cristallin, éthéré et une dame de gris et de smog, elle se disait artiste, c'était vrai ; déjà, j'ai abandonné l'idée, l'ambition, le dessein d'établir quelque chose de concret ; je ne sais pas tricoter et mon fil rouge, je l'ai égaré, tant pis pour le chandail de laine. La ponctuation suit mes propres règles, de toute façon, je m'en fous, je lui crache dessus, l'intrigue aussi, il n'y en a pas, c'est ma vie. Et tant pis pour les personnages, s'ils sont égarés et mal construits, c'est comme ça que je les aime, insaisissables, même si l'héroïne est bizarre et qu'elle n'a pas de gros courage ni de gros seins, même si l'homme n'a pas le port altier des gens arrogants, puissants, ou les pectoraux qui saillent à travers le T-shirt trop petit.

...Tant pis pour tout ça, c'est à moi, cette histoire, j'en dicte les règles, les digressions, les figures de style et les métaphores filées médiocres ; tant pis pour toutes les répétitions, les pâtés d'encre quand je tremble et les ratures ; si coucher sur le papier, sur le deck, si tout cela m'aide, alors baste, alors merde, putain, dirais-je même, osons les mots. Si après cette rédaction, gisante sur le canapé rouge, celui qui fait face à l'immensité du hall, sur un coussin trop mou, je peux gagner les plumes, heureuse d'avoir joué de la mienne, d'avoir créé, qu'il en soit ainsi. Peut-être un jour, je mettrais des mots sur ces sentiments, sur le désespoir indicible ou la joie fugace, l'angoisse de l'amour, la flemme du titan, pour les comprendre enfin, les dompter, comme on dompte les écureuils ou les NI , au fusil à plasma. Déjà, ma verve se tarit et mon deck compte mes mots : 676. Sans doute est-ce un début, et que ça suffira ; j'ai ouvert un puits, celui dans lequel je pourrai m'épancher, étancher, ma soif et ma faim d'envolées lyriques, bientôt, j'y boirai à nouveau, jusqu'à satiété.

◊ Commentaires

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  Alice~51211 (214☆) Le 31 Mai 2016
  Image: Vénus à son miroir - Diego Vélasquez (détail)
  
  Nota Bene: Cette catégorie est roleplay, le manuscrit existe en jeu, contrairement aux catégories "La Marmoréenne" et "Le Narrateur".