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EDC de 36896

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Cacher

400 - Bad Request

Article HRP. Inutilisable In-Game.
Si ce texte en petit ne loge pas dans une ligne, je vous conseille de cliquer sur Cacher juste en haut à droite! →



Tu sais ce qu'il se passe, quand tu retires la goupille d'une grenade?
S'il savait...
Elle explose quand on relâche son levier, non?
Je m'en fiche.
C'est ça.
Entraîne-moi.
Je crois que...Shaia, c'était ma goupille.
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I want to push it right over the line... ♪



    Je déconne pleinement, ces derniers temps. Ça doit être parce que j'en ai marre d'être gentil, d'être ce con à qui on va demander un service gratuitement et qui ne réclamera rien en retour. Les gens te demandent tout et n'importe quoi, à tout moment, et ils se permettent de te juger après coup. Tu n'aurais pas du faire ça comme ceci, tu ne m'a pas écouté sur cela...mais vos gueules. Y'avait que moi, le moi de l'instant présent, pour le faire. Si vous êtes pas content, bougez vos gros culs à ma place.

    Le problème est simple à régler: il suffit de ne s'occuper plus que de soi, et d'ignorer les voix des autres. Le monde serait tellement plus plaisant s'il était silencieux, s'il n'existait pas de langue perfide pour darder un avis tordu sur soi. A défaut, on peut devenir sourd. Quant à la première partie de la solution...j'ai beau m'y essayer, je n'arrive pas à être plus égoïste que les autres. Alors je patiente, une bouteille à la main, écoutant un tel ruminer sa vengeance ou se lamenter sur son sort; j'attends d'avoir mon rôle à jouer.

    Sans le sourire, je reste aussi con qu'avant. Un véritable incorrigible, encore plus déterminé à faire ce que je pense. Mais je ne suis plus fou, parce que je n'essaie plus de retenir futilement ce levier. Après tout, le futur est inéluctable.

Combien de temps ai-je cru avoir le contrôle?


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    Elle chute, encore une fois, impressionnée par cet amalgame de pixels sans consistance réelle qui l'assaillit. C'est logique, car la peur est alimentée par l'imaginaire, et l'imaginaire ne naît que de l'indicible. Mais ce n'est pas le résultat que je souhaite obtenir. Du haut de mon perchoir improvisé, une tour translucide grisâtre faussement vertigineuse sur laquelle je loge à peine accroupie, j'interpelle la malheureuse après avoir dissous le leurre à mon image qu'elle aurait du esquiver.

    « Tout peut arriver, ici-bas.
- Je sais...je sais, que tout est possible, ici! elle répond, plaintivement.
- Alors montre-le moi en arrêtant de te laisser surprendre. »

    Nouvel essai, nouvel échec. Elle lâche l'arme sous la surprise, incapable d'adapter ses réflexes au monde virtuel. Une erreur qui lui aurait coûté un shunt s'il s'était agi d'un autre plongeur ou d'une contre-mesure.

    « On va continuer ce manège jusqu'à ce que tu réagisses mieux et plus vite. »

    Elle ramasse son fusil pauvrement modélisé, déterminée à faire mieux, sans rien savoir de la vraie épreuve, qui consiste à repousser les limites de son endurance. Un bête exercice, identique, en boucle, durant toute la session de plongée, et sans avoir la sensation de progresser. Pourtant, elle s'habitue déjà à ce monde faussement tangible. Mais il lui reste beaucoup à faire.

    « Pourquoi est-ce que tu vises les cibles? je l'interroge, toujours aussi froidement, la prenant au dépourvu.
- Hé bien...je suis bien obligé de...
- Qui d'autre que toi te l'oblige? »

    Je matérialise dans mes mains un pistolet semblable à un 9mm standard, puis je tire un laser à ma gauche, qui décrit une courbe serrée pour revenir sur la dernière des cibles, qui explose dans une gerbe de particules artificielles. Après un temps de surprise, elle finit par acquiescer. Elle fait désormais la différence entre un tir calculé par vecteur et un verrouillage d'après l'identifiant matriciel, ce qui est la base pour les plongeurs et du charabia pour les autres.


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    Pourquoi avoir décidé de l'entraîner aussi impitoyablement? A première vue, je n'ai aucune raison de le faire, rien à y gagner, ou en tout cas plus à y perdre. C'est sûrement égoïste, comme un simple besoin de s'éloigner de ses problèmes en prenant de haut ceux des autres.

    Ou pire, c'est peut-être tout simplement de l'hypocrisie, à prétendre faire quelque chose de bien. Le faire pour quelqu'un d'autre, pour lui, en l’occurrence. Et après, pouvoir me plaindre du sort de héros surexploité que je me suis créé.

    Tant d'idées pour se mentir à soi-même. Je joue avec les émotions de quelqu'un d'autre par curiosité, j'entretiens sa haine sans lui être d'aucun soutien, et par-dessus tout...je m'en fous. Son malheur ne me fait rien, mais j'ose appeler ça un acte de bonté.

Combien de temps déjà, depuis que j'ai relâché le levier?


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    Son orgueil a doublement pris le dessus, et c'est en grande partie ma faute. Sa première connerie, c'était d'insister pour s'entraîner sans avoir dormi de la nuit. Elle l'a payé d'un shunt dès le premier exercice, et c'était assez cherché pour être mérité. L'autre part d'emmerdes, c'est de l'avoir trop poussée. Parce que cette nuit, elle l'a passée dans une cuve du CdC en génomorphothérapie. Change-race, comme disent les pauvres d'esprit.

    Mon but n'était pas de lui faire pousser des plumes. Elle a beau avoir un nouveau potentiel à exploiter, on n'est pas plus avancés sur sa situation. J'aurais aimé lui faire comprendre qu'elle n'avait pas besoin de devenir différente...peut-être qu'elle souhaitait l'être de toute façon, et que j'étais le prétexte parfait pour ne pas avoir à l'assumer.

    Le mal est fait, de toute manière. Elle est recroquevillée sur le canapé, à souffrir le martyr, son nouveau code génétique en ébullition. Elle m'entend m'éloigner et relève la tête, révélant une paire d'oreilles ensanglantées.

    « Tu vas où...comme ça?
- Je sais être bon perdant, je lui dis en attrapant la trousse de premiers secours de mon sac à dos, lui-même posé contre un terminal.
- Crache ton venin, vas-y, comme si ça me faisait quelque chose...
- Tu souffres assez comme ça sans que j'aie besoin d'en rajouter. »

    J'extirpe des compresses et du désinfectant avant de nettoyer les pointes nécrosées, noircies, dont l'une a été suffisamment grattée pour pendre par un lambeau de chair au reste de l'oreille. Je finis maladroitement de m'occuper de ce tableau macabre, avant de reculer sur une vision d'ensemble de ce visage aux traits encore plus pâles et tirés qu'auparavant.

    Un regard vague, éteint, me répond silencieusement. Je ne peux pas m'empêcher de me demander si elle est reconnaissante, si elle me déteste, ou si elle n'en a plus rien à foutre. Je crois qu'elle aussi, en fin de compte, elle veut juste avoir la paix.


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    Comment lui dire d'abandonner? Elle est comme toutes les autres, à se brûler vive d'espoir, à s'aveugler d'illusions et de fantasmes, à se perdre en métaphores réconfortantes. En vérité, elle est au moins aussi folle que moi. Elle le sait pertinemment, qu'on ne pourra le faire revenir de nous mêmes, mais elle s'acharne, elle gratte la moindre piste à s'en user les ongles, à en faire saigner les doigts. Elle s'est même défigurée, dans l'espoir que cette tentative soit différente des autres. « Non, pas cette fois, ça sera différent, ça marchera... »

    Et est-ce que ça a marché? Est-ce que le destin a décidé de la prendre en pitié en se réécrivant? Bien sûr que non. On ne peut pas combattre le courant, seulement accepter ou non de se faire emporter. Je n'arriverai probablement pas à la détourner du déni; j'en serai certain après avoir essayé. Mais je ne tomberai pas dans son jeu: il n'y aura qu'une seule tentative.

    Le seul combat qui vaille encore le coup, c'est celui contre son ego. Accepter de n'être qu'un projectile en vol libre, dans la direction imposée par la main qui l'a jeté. Se résoudre au fait que, quoi qu'on fasse, on ne sera jamais maître de son avenir, et que tout ce qu'il nous reste à faire, c'est d'attraper la moindre parcelle de bonheur en attendant de finir sa course au sol.

Combien de temps restant, avant l'ultime détonation?


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