Recherche

EDC de Irulan

Bienvenue sur les EDCs de Dreadcast
Vous trouverez ici tous les articles rédigés par Irulan

Cacher

Contemplation

"La véritable nuit n’est pas l’absence de lumière, mais l’ombre qui persiste en nous."

- Anonyme -


Un souffle suspendu. L’éther figé dans une résonance d’instants absents. L’espace se courbe sous mes pas, étire ses silences entre la brume et la matière. Mon regard s’échappe, glisse le long des contours d’un paysage qui n’appartient à rien, ni au présent ni au passé. Juste une éternité fragmentée en nuances subtiles.

Dreadcast, son architecture noire et ses néons criards, pulse à travers les rues détrempées de pluie. Ses façades rongées par le temps et la négligence s’élèvent dans une verticalité étouffante. Les ruelles sentent la cendre et la rouille, un mélange d’ozone et de chair moite, une ville qui respire à contrecœur, qui tord et broie ceux qui s’y attardent trop longtemps. Je m’y perds parfois, volontairement, noyée dans ses clameurs étouffées.

Au-dessus, aucun ciel, aucune étoile, seulement ce smog dense qui avale les hauteurs et repousse l’horizon. Une chape de plomb suspendue sur nos têtes, éternel rappel que la lumière ici est factice, artificielle, filtrée à travers les filtres sales d’une ville trop lourde de secrets. Ce n’est pas l’obscurité qui pèse, mais l’absence de ce qui devrait la trouer.

Là, au seuil du vide, je n’attends rien. Pas de réponse, pas de vérité, simplement la perception pure. Un éclat de verre sous une lueur crépusculaire, le murmure du vent qui danse sur les pierres, le frémissement d’un monde en apnée. Un instant se creuse, se dissout dans les failles d’un temps suspendu.

Les ombres, fidèles compagnes, s’étirent le long du chemin, effleurent les souvenirs, résonnent en spectres dociles. Elles ne réclament rien, ne s’accrochent à rien. Juste une errance douce, une caresse insaisissable sur l’ossature des âmes.

Un pas. Puis un autre. Je deviens ce regard qui se perd. Je deviens l’ombre entre les ombres, l’instant qui se consume sans bruit. La contemplation n’est pas une quête. C’est un abandon. La chute libre d’une conscience qui accepte de ne plus nommer, de ne plus désirer, de ne plus espérer.

Le Cercle de l’Orient domine la Haute Ville, bastion de l’ordre au sein du chaos rampant. Son architecture massive et austère tranche avec les structures effilées qui l’entourent. Un édifice qui veille et enferme à la fois, sanctuaire de ceux qui imposent la loi dans une ville qui ne la respecte qu’en surface. Loin de la démesure anarchique de la basse ville, il est une cage dorée où l’on surveille autant qu’on est surveillé. Flic ou proie, cela dépend du moment, du visage que l’on porte, de l’heure où l’on marche.

Les pas résonnent sur le pavé humide. Des silhouettes traversent l’espace sans jamais vraiment exister, effacées dans leur propre insignifiance. Derrière une grille entrouverte, un regard me frôle avant de disparaître. Est-ce une menace ou un simple reflet du doute ? La ville est une scène sans fin, où chacun joue un rôle qu’il ignore encore.

J’entends une musique lointaine, une note dissonante qui s’échappe d’un bar aux vitres fumées. Une mélodie grinçante, brisée, incapable de s’élever au-delà du brouillard toxique. Un air qui cherche un ciel qui n’existe plus. Comme nous tous.

Je marque une pause, appuie mon épaule contre un mur fissuré. Les néons vibrent, hésitent, clignotent dans un langage codé que seul le silence peut comprendre. Un instant, je ferme les yeux. Pas pour rêver, pas pour fuir, mais pour mieux écouter la ville respirer sous la tension électrique de son sommeil avorté.

Le murmure d’une source, la dernière vibration d’un accord qui s’efface. Rien ne demeure, et pourtant tout existe. Comme un écho subtil du monde qui refuse de s’éteindre. Une éternité qui palpite sous la peau du silence.

Là, au seuil du vide, je ne suis plus qu’un regard. Juste cela. Un regard qui ne cherche plus à comprendre, mais qui accepte d’être traversé.

Mais la ville ne dort pas. Elle ne permet pas cet abandon. Une sirène au loin, un cri étouffé, un écho de pas dans une ruelle adjacente. Une tension latente, une menace sans nom, quelque chose de trouble qui s’agite sous la surface lisse des apparences.

Je soupire et reprends ma route. Demain, je regarderai encore, et peut-être, juste peut-être, je verrai enfin.

Informations sur l'article

Souvenirs
09 Mars 2025
103√  7 0

Partager l'article

Dans la même categorie

◊ Commentaires

Aucun commentaire